Le Katanga est une terre prometteuse. Et cela, même son fondateur, un mercenaire appelé Msiri, l'avait déjà bien compris. L'homme en question est allé de conquête en conquête, collectionnant les victoires, les ossements humains, et les filles de ceux qu'il a vaincus... A la fin de sa vie, lors de sa rencontre avec des soldats belges mieux armés que lui, Msiri comptait 1200 femmes dans son harem. Même si la tête a été coupée, la lignée d'un homme qui a eu autant de femmes est impossible à faire disparaître. Et l'actuel ministre de l'Intérieur du Katanga, Godefroid Munongo, n'est autre qu'un des nombreux petits-fils de Msiri...
Ainsi, Munongo est conseillé par Armand Orsini, et il est question, en lien avec Bernard Forthys, directeur de l'Union Minière du Haut-Katanga, de recruter une armée de mercenaires, chargée de défendre les intérêts de l'UMHK sur le territoire katangais, et notamment une immense exploitation de cuivre... Car le Katanga est la cible de l'ANC, l'Armée Nationale du Congo, qui cherche à mettre la main sur tant de richesses. Mais il y a aussi les milices civiles qui sont un vrai danger...
C'est dans ce contexte qu'on retrouve une famille de riches propriétaires blancs, en août 1960. Le père semble pressé de récupérer les diamants de sa compagnie, de récupérer sa femme et sa fille, et de fuir le pays. Mais les choses se dérouleront bien différemment, notamment par l'action de Charlie, leur homme à tout-faire, local. Un fainéant de première, qui voit là, en sacrifiant cette famille aux milices, l'occasion de devenir richissime en récupérant la valise pleine de diamants...
De son côté, Orsini démarre le recrutement de son armée de mercenaires à faire venir au Katanga. Elle sera composée d'hommes européens, qui ont tous fait leurs preuves dans des faits de guerres, comme Félix Cantor, André Ropagnol, ou encore Gunther Gheysel, ancien SS que l'idée de dégommer des soldats noirs réjouit particulièrement...
Après avoir travaillé ensemble sur les six magnifiques tomes de Il était une fois en France, Fabien Nury (au scénario) et Sylvain Vallée (au dessin, avec des couleurs de Jean Bastide) remettent le couvert avec ce premier tome de Katanga. Une nouvelle série qui transpire les heures sombres de la colonisation africaine, au début des années 60. Une période où le spectre de Léopold II est bien présent...
La présentation des personnages est ici particulièrement efficace. Les auteurs prennent le temps d'introduire l'ensemble des protagonistes, nombreux, et cela est un excellent augure pour la suite de la série. On se retrouve facilement plongés dans cet univers, qui emprunte des éléments historiques, mais sans que la série ne se veuille historique. Les personnages sont purement inventés, et parfaitement charismatiques, sous le trait fin et précis de Sylvain Vallée.
Ainsi, les dessins sont une vraie réussite, meilleurs même que dans Il était une fois en France, où la qualité était pourtant déjà bien présente. Les couleurs sont plus complexes, plus travaillées, et il conviendra de saluer en cela le travail de Jean Bastide. C'est beau et détaillé, sans être réaliste : un dessin qui a une vraie signature, et qui conserve une grande part de lisibilité, quels que soient les décors traversés par les protagonistes du récit.
Fabien Nury nous emmène donc dans une Afrique certes imaginaire, mais très réaliste, dans les années 60. Son récit est ici complètement maîtrisé, tant dans la présentation des protagonistes que dans leurs évolutions et leurs relations... Un premier tome convaincant, qui est une franche réussite dont j'attends la suite avec impatience !
