Louis-Ferdinand Céline est chez lui, à Meudon, en plein travail, en pleine écriture de Rigodon, célèbre roman qui clôturera la trilogie allemande de l'écrivain controversé. Nous sommes en 1960, et l'écrivain est âgé. Cela ne l'empêche pas d'être râleur et presque acariâtre, tout en se remémorant certains éléments marquants de sa vie, à commencer par ses amours...
Et alors que c'est avec Lucette, une danseuse, qu'il partage sa vie depuis bien des années, c'est à une autre danseuse, Elisabeth Craig, qu'il pense. Des souvenirs vifs, issus d'une période heureuse. Un ange qui passe, qui a illuminé la vie de celui qui était alors médecin. Et ces anges n'ont pas été nombreux, dans la vie de l'écrivain...
Et puis, il y a les souvenirs de la jeunesse à Courbevoie, les souvenirs d'amitiés avec Arletty, notamment. Et la première rencontre avec Gallimard, le fameux éditeur, qui a énormément compté pour lui, même si cela ne transparaît pas forcément ici...
Le chien de Dieu est issu de la rencontre de Jean Dufaux et de Jacques Terpant, qui nous régale de ses dessins réalistes et de ses couleurs souvent sépias, et très souvent en bichromie ici. Le livre qui en résulte, qui paraît chez Futuropolis, trouvera une place de choix à côté du La cavale du Dr Destouches, de Christophe Malavoy, Paul Brizzi et Gaëtan Brizzi, paru en 2015 chez Futuropolis également, et portant également sur le complexe personnage de Céline.
Car le livre garde ici cette complexité. Pas évident de s'attacher au personnage principal, si décrié, dont il est question ici. D'autant que Céline, acariâtre et presque mélancolique, ne dégage pas forcément beaucoup de sympathie. Une distance bien évidemment volontaire, instillée par Jean Dufaux et Jacques Terpant, mais une distance qui parvient à mettre en avant le côté fascinant d'un personnage qui a vécu plusieurs vies..
.La relation avec les nazis, l'ascension de cet écrivain sont traités ici avec beaucoup de sérieux. Mention spéciale pour cette scène où son éditeur de l'époque, Robert Denoël, le confond avec sa ménagère de voisine : un moment plein d'humour, qui fait du bien à la lecture de ce livre.
L'association, inédite, entre Jean Dufaux et Jacques Terpant nous permet de découvrir un one-shot complexe sur un personnage qui ne l'est pas moins. Une excellente découverte en perspective pour ceux qui ne souhaitent plus entrer dans des histoires trop convenues.