Théo touche le fond. Sa fiancée le plaque suite à une fausse couche parce qu'à 30 ans, il est trop vieux pour n'être qu'un musicien irresponsable, son groupe de rock le plaque aussi parce qu'à 30 ans, il est trop vieux pour les suivre dans leurs délires et sa mère décède. Pour couronner le tout, un monstre fait de détritus et de morceaux de corps humain fait irruption chez lui. Il est secouru par Trognon de Pomme, une fée, qui l'emmène dans un univers parallèle, Faërie, là-même où résident ceux qui le traquent.
Le premier quart du roman, jusqu'à l'arrivée de Théo dans le monde de Faërie, est très lugubre. Le protagoniste flirte avec la dépression suite aux différents coups durs qu'il enchaîne et l'intrigue avance peu, l'essentiel du récit portant alors sur les phases d'introspection de Théo. Tout l'inverse de la suite du récit, beaucoup plus rythmée.
Une fois à Faërie, Théo va de nouveau de mal en pis mais cette fois-ci physiquement plutôt que psychologiquement. Il semble que tout le monde puisse vouloir le tuer dans ce nouveau monde et il ne s'est pas plus tôt sorti d'une situation épineuse qu'il est confronté à une seconde. Pourtant, à la différence du début du récit, ces péripéties contiennent une bonne dose d'humour, par leur caractère décalé, et Théo peut compter sur l'aide d'improbables alliés à commencer par la fée Trognon de Pomme. Cette fée, légèrement revêche, est un personnage secondaire très bien construit. Elle permet de faire le lien avec le monde de Faërie, d'apporter des éléments comiques mais surtout de pousser Théo dans ses retranchements.
Si la première partie du roman donne la possibilité à Théo de faire le bilan de ses échecs, la deuxième partie lui offre la chance de véritablement changer de comportement et de devenir acteur de sa nouvelle vie. Ces changements psychologiques du personnage principal, qui ne se feront pas sans heurt, constituent l'un des points forts du récit. Un autre point fort est son univers. Tad Williams donne vie à un véritable monde féerique, à la géographie et à la temporalité aléatoire, empli d'une multitude de peuples et d'espèces, soumis à sa propre organisation politique, à ses propres enjeux sociétaux, environnementaux et technologiques. On plonge en somme dans un monde riche et mystérieux, entraperçu fugitivement au cours des aventures de Théo.
Pour conclure, la guerre des Fleurs comprend tous les ingrédients d'un bon roman de fantasy : une quête initiatique un peu particulière, des vilains très vilains, des personnages secondaires attachants, de l'humour et un univers travaillé !