Il est des jeunes gens qui doivent faire face simultanément à des problèmes bien complexes. Malone, reporter à la Gazette, doit, dans n'importe quel ordre : interviewer le professeur Challenger, que d'aucuns considèrent fou, maniaque, menteur et dangereux ; et démontrer à la charmante Gladys qu'il a l'étoffe d'un héros.
S'il est, heureusement, aisé de discuter avec la jolie Gladys (mais moins de lui prouver son héroïsme), rencontrer le professeur Challenger est un peu plus chaud. L'homme exècre les journalistes. La presse et ses pairs l'ont humilié au retour de sa dernière expédition en Amérique du Sud.
Il y aurait vu des animaux préhistoriques... et toutes ses preuves sont tombées à l'eau lors d'un naufrage au retour du voyage. Comme c'est commode. Et pourtant, s'il y avait du vrai derrière cette histoire, Malone tiendrait de la dynamite pour reporter en mal de renommée au bout de sa plume...
Après d'âpres négociations, lors d'une énième conférence grotesque de la Société des sciences naturelles où Challenger perd, de nouveau, ses nerfs, Malone propose habilement l'organisation d'une contre expédition.
Pour être justifiée, celle-ci doit être menée par le plus hargneux contradicteur du professeur Challenger, l'honorable Summerlee ; celuic-i forme immédiatement une équipe composée d'un aventurier expérimenté, John Roxton, et de Malone, qui publiera le récit de l'épopée dans son journal avec l'indépendance d'un professionnel de la presse (ce qui lui permettra, également, de passer pour un héros aux yeux de la belle Gladys).
Les hommes sont prêts. L'aventure peut commencer...
Le monde perdu est un roman que j'ai vu plusieurs fois - et selon des adaptations différentes - sur écran, avant, d'enfin, le lire. Pour quelqu'un qui était un petit garçon expert ès dinosaures (ce qui est assez commun, je vous l'accorde), je m'étonne moi-même de ce retard, alors que de cette aventure découle la merveille Jurassic Park.
On ne va pas aller plus loin dans l'enthousiasme nostalgique. Le monde perdu de Conan Doyle a été écrit en 1912, soit plusieurs dizaines d'années après les textes de Jules Verne qui, dès les premières pages de cet ouvrage, m'ont semblé plus modernes et contemporains. Le monde perdu a pris un sale coup de vieux. C'est un roman publié dans un collection jeunesse et dont le ton semble aller naturellement vers ce public. Je pense qu'il doit horrifier régulièrement les élèves bien intentionnés qui le choisissent comme lecture scolaire.
Ce récit a plusieurs défauts bien désagréables.
Premièrement, le rythme donné par Conan Doyle à son aventure est plat. A aucun moment on ne se retrouve essoufflé à la suite d'un Malone poursuivi par des hommes-singes dans une jungle sombre et inconnue. La tension ne s'élève pas. On assiste à quelques tentatives d'échauffements mais l'auteur britannique ne fournit jamais le petit supplément nécessaire pour captiver, ce qui a aussi pour conséquence de rendre l'ambiance de ce voyage plutôt hermétique. La narration, concentrée sur Malone, aurait pourtant pu aider, en instiguant via ce personnage le doute et la crainte au lecteur.
Ensuite, cette écriture a fait que j'ai éprouvé les pires difficultés à avoir une quelconque empathie envers les quatre (hé oui) principaux protagonistes. Ils sont distants avec le lecteur et passent plus pour des machines (qui remplissent parfaitement leur rôle) qu'à de vrais humains.
Je vous le concède : Cette histoire n'est plus de prime jeunesse. Mais la vieillesse n'est pas une excuse. Le siècle précédant la parution de ce livre, Verne et Dumas savaient, avec brio, sortir de leur stylo des personnages attrayants. On est, ainsi, loin des deux créations les plus connues de Conan Doyle que sont ces messieurs Holmes et Watson.
Enfin, et plus accessoirement, l'éditeur ne pouvait-il pas engager un nouvel illustrateur pour refaire les gravures hideuses qui parsèment le texte, à l'instar des rééditions en intégrales des nouvelles d'Howard ?
Vous sentez ma déception face à ce pilier de l'aventure littéraire. Toutefois, sa lecture n'a en rien été un calvaire. J'ai pris du plaisir à découvrir ce vieux roman d'où se dégage une atmosphère poussiéreuse de musée. Oui, Le monde perdu fait bien son âge. Oui, son ton académique rend la lecture-détente peu agréable. Mais c'est une aventure monumentale qui a inspiré énormément d'auteurs du XXème siècle. Rien que par curiosité intellectuelle, ce bouquin vaut le coup d'être lu. Au pire, il pourrait vous plaire !
Dans mon cas, je me console en me rappelant que j'avais été aussi partiellement déçu après avoir lu le Jurassic Park de Michael Crichton.