Adakhan est enfin parvenu à son but : la Centrale, là où vivent et travaillent ceux qui, dans l'ombre, régissent Manokhsor. Il va avoir beaucoup à apprendre avant de pouvoir intégrer une équipe de travail au sein de laquelle se rendre utile, et c'est à cela que sert le "recyclage" proprement dit, ou du moins les trois premières sessions dudit. Etant qui il est, il ne manque pas de regimber devant les interdits, et notamment le tabou absolu du sexe entre "récupérés" d'abord, puis entre membres de la même équipe. Par ailleurs, une fois membre à part entière de l'équipe du Vieux, Syrius, JH3-VH9, il va s'impatienter des délais que celui-ci lui impose pour lui révéler ses projets secrets.
Quelque part, la société centralienne décrite dans cet opus se révèle encore plus dystopique que celle, moyenâgeuse, de Manokhsor décrite dans le tome précédent. Certes, il y règne moins de contraintes et menaces physiques évidentes, mais chacun peut être espionné à tout moment, comme à Manokhsor : l'une des salles de vidéo-surveillance est consacrée à la Centrale elle-même et à ses habitants. Cette cité souterraine futuriste par rapport à Manokhsor évoque désagréablement notre présent, d'une certaine façon.
Aucune rupture avec le tome précédent : nous retrouvons Adakhan où nous l'avions laissé, et cette continuité est matérialisée dans la numérotation des pages du roman, qui commence après la fin du tome précédent. En revanche, le cadre de l'intrigue est beaucoup plus futuriste. L'auteur semble aussi à l'aise avec les descriptions de ce cadre que de celui où se déroulait l'intrigue antérieure. Pour le lecteur, ce changement d'atmosphère - même s'il est plus apparent que réel, au final - est bienvenu, en ce qu'il a, comme le héros, des éléments nouveaux à découvrir.
En revanche, le personnage principal n'évolue pas vraiment. Son aspect "adolescent attardé" est d'ailleurs souligné plusieurs fois dans le récit pour expliquer son impétuosité et ses crises de révolte contre toute autorité. Ce serait moins agaçant si les personnages autour de lui changeaient notablement. Mais comme ils sont les mêmes personnes, ou des doubles (Laïtha / Lhianatha) de ceux déjà découverts dans Les années d'apprentissage, ce n'est pas le cas. Pour le coup, ils en deviennent moins crédibles en tant que personnages. De la même façon, les touches d'humour de l'auteur (les pantalons djinns, par exemple), très fréquentes dans ce tome, m'ont semblé contribuer à enlever de la crédibilité à cet univers en tant que tel.
Dans ce tome sont expliqués les rapports entre la Centrale et Manokhsor, ainsi que leur origine respective. En ce sens, le roman apporte toutes les réponses que j'attendais à la fin du premier tome. S'il y a toujours des longueurs, cette fois dans les discours, parfois logorrhéiques, des personnages, et que la situation, dans ces sociétés, à la fois de la sexualité et du genre, "date" le roman, cela ne m'empêchera pas de lire la suite avec plaisir.