Les Chroniques de l'Imaginaire

La déesse des marguerites et des boutons d'or - Millar, Martin

"Je peux faire pousser des marguerites et des boutons d'or très vite. Regarde !"
Métris agita la main. Comme par magie, un tapis de marguerites et de boutons d'or apparut à leurs pieds. Debout au milieu d'un océan de fleurs, la nymphe semblait contente d'elle.

Faire pousser des marguerites et des boutons d'or, c'est bien joli, mais pas forcément très utile pour arrêter une guerre. En cette année 421 avant J.-C., voilà déjà dix ans qu'Athènes est en guerre contre Sparte. Le peuple épuisé souhaite la paix.
Mais dans l'ombre les militaires et les marchands d'arme œuvrent à entretenir la guerre. Ils ont commandité la venue à Athènes de la déesse Laet, qui inspire aux hommes les mauvais choix, pour semer la discorde lors de la conférence de paix qui doit se tenir lors du festival des Dyonisies.
La déesse Athéna a décidé de donner un coup de pouce au camp des pacifistes. Mais comme le puissant Zeus a interdit sa présence à Athènes pendant le festival, elle mandate à sa place sa fidèle Brémusa, une amazone qu'elle a sauvée lors de la guerre de Troie près de huit cent ans auparavant, qui sera assistée de la nymphe Métris. Les deux femmes ont pour mission de contrer l'influence de Laet. A défaut, il leur faudrait faire basculer l'opinion publique dans le sens de la paix, en promouvant la pièce du même nom qu'Aristophane compte présenter lors des Dyonisies. Hélas, le poète comique semble bien mal parti : son mécène tient trop serré le cordon de la bourse, les accessoires sont pitoyables, les acteurs ne jouent pas comme il faut...

Ce roman au titre fleuri nous plonge dans la vie quotidienne de la Grèce antique à l'époque de l'apogée d'Athènes. Très intéressant et bien documenté, cela colle au plus près de ce qu'on sait de l'époque, au détail près que les dieux et autres créatures mythiques y sont présents dans la vie des mortels. Pourtant ils sont sur le déclin, leur influence diminuant peu à peu. Le lecteur découvre les balbutiements - et les premières dérives - de la démocratie, croise au fil des pages des personnages qui deviendront célèbres (Aristophane bien sûr, mais également Socrate ou Platon) et surtout se voit confier les secrets de toutes les coulisses de la création d'une pièce de théâtre comique.

Et comique, ça l'est ! Les déboires d'Aristophane prêtent immanquablement à sourire, à l'instar de sa quête récurrente pour obtenir pour sa troupe les phallus (artificiels) les plus gros et les plus impressionnants qui soient, sous peine de se faire surpasser pas ses rivaux... Le ton est toujours léger et réjouissant, malgré la gravité du sujet.

Les personnages principaux sont assez peu nuancés, mais leur diversité est bienvenue. Aristophane est l'auteur obsédé par son œuvre et les distinctions qu'elle reçoit ; Luxos, jeune poète débutant et autodidacte, incarne les difficultés pour percer quand on est méconnu et qu'on ne provient pas de la bonne classe sociale, même lorsqu'on a du talent ; Brémusa est la guerrière qui ne pense qu'aux combats ; et enfin, Métris, la ravissante et insouciante nymphe, plus intéressée par l'Amour et les divertissements que par sa mission, apporte à l'ensemble une bonne touche de légèreté et de bonne humeur !

L'auteur ne s’embarrasse pas de subtilités, mais son histoire se révèle fort agréable à lire, à la fois intéressante et drôle, par son cadre antique intelligemment exploité.