Les Chroniques de l'Imaginaire

Autonome - Newitz, Annalee

En 2144, Jack Chen est une pirate. Elle sillonne les mers avec son sous-marin pour vendre des contrefaçons de médicaments qu’elle fabrique elle-même. Pourtant, contrairement à ses prédécesseurs hors-la-loi, l’appât du gain n’est pas ce qui attire cette scientifique. Les drogues récréatives qu’elle écoule lui permettent de financer la création de médicaments susceptibles de sauver des milliers de vies, mais dont la production officielle, brevetée, est étroitement contrôlée par des industries pharmaceutiques bien décidées à conserver leurs parts de marché. 

Seul problème pour Jack, sa dernière drogue rétro-ingéniérée a des effets secondaires mortels. La militante anti-brevets est persuadée que le problème ne vient pas de ses copies, mais du médicament originel, le Zacuity, distribué par les grandes entreprises pour accroître l’appétence au travail et la productivité de leurs salariés. Elle décide de faire éclater la vérité au grand jour, quitte à prendre des risques.

Elle devra notamment se méfier des biobots militaires envoyés par l’équivalent de la répression des fraudes. Pour Paladin, biobot militaire chargé de sa traque, cette mission sera son baptême du feu et va l’entraîner bien au-delà de sa programmation originelle. 

En parcourant le résumé de ce livre, je m’attendais à un conte philosophique ou à une sorte de roman très – trop – moralisateur. Ce n’est pas exactement le cas. Annalee Newitz défend des idées et principes forts dans son ouvrage. 

Elle s’interroge ainsi sur la logique de la propriété intellectuelle en faisant la promotion des freelabs, similaires dans leur concept à ces fablabs qui se développent un peu partout et où l’on peut réaliser ses propres objets, mais focalisés sur la production pharmaceutique. 

Au-delà des médicaments, elle s’interroge sur le thème maintes fois abordé de la propriété humaine. Dans Autonome, certains naissent libres avant d’être asservis tandis que d’autres, plus rares, sont asservis avant de devenir libres, « autonomes ». L’esclavage y est une réalité hideuse mais peu contestée par les protagonistes. La question de la conscience des machines est également présente à travers le personnage de Paladin, qui n’est pas qu’un ensemble de programmes et de métal, mais un être capable de penser et d’aimer.

Ces idées en marge de la lecture soulèvent des points intéressants, sans être inédits ou traités de manière particulièrement percutantes. Peut-être sont-elles un peu trop manichéennes à mon goût mais elles témoignent de la sincérité de l’approche de l’auteure.

Heureusement, Annalee Newitz mélange ces différents éléments à une véritable intrigue, qui peut d’ailleurs tout à fait se lire au premier degré, comme un roman d’aventures, sans s’interroger davantage. En effet, le rythme est soutenu grâce à des rebondissements à la chaîne. L’intrigue générale, en 2144, alterne avec des passages sur la jeunesse de Jack. On s’attache ainsi davantage à ce personnage un peu déraciné. Ces réminiscences donnent plus de profondeur à un univers parfois un peu trop vite survolé. Elles ne sont cependant pas particulièrement introspectives et contiennent, elles aussi, leur dose d’action. 

J’ai apprécié ce roman pour ce rythme enlevé et il plaira très certainement à tous les amateurs d’aventures dystopiques et de pirates futuristes.