Les Chroniques de l'Imaginaire

La Maison d'Equité (Reine de Mémoire - 5) - Vonarburg, Elisabeth

Pierrino, méritant son nom de Petit Dragon, est transporté par Hyundpenh depuis l'ancienne propriété Garance jusqu'à proximité d'Ankhin, où il doit reprendre L'Aigle des Mers. Et c'est presque trop tard, car le prince Gorut a pris le pouvoir, et le pays se referme. Sur L'Aigle des Mers, en confrontant les souvenirs d'Haizelé et ce qu'il a appris dans les carnets d'Ouraïn, il découvre avec horreur l'identité du père biologique d'Agnès.

Pendant ce temps, la Compagnie des Deux-Rives poursuit sa brillante tournée, et Senso arrive enfin, grâce à l'aide d'Alexis, à écrire la pièce qu'il projetait. Mais à Bordeaux, Larché est grièvement blessé par une balle perdue, et refuse un médecin. Senso et Alexis utilisent les objets rituels atlandiens remis à Senso et Pierrino par Jacquelin, pour sublimer Larché, avec l'aide d'un dragon. Malheureusement, cette cérémonie a pour conséquence un grave affaiblissement de Senso, et une faille dans sa relation avec Alexis, qui semble n'avoir quasiment pas de souvenir de ce qu'ils ont fait ensemble.

Que Jiliane le veuille ou non, et elle y répugne de plus en plus après ses derniers souvenirs avec Ouraïn, elle continue de vivre par l'intermédiaire de la Carte les derniers temps de l'Emorie, et l'installation subséquente de la famille Garance à Sirilanka, où Sigismond amène Haizelé et Raihyan, puis à Venise.

Ce tome voit enfin la réunion de la famille Garance, à Aurepas, où doit être donnée la première de la pièce écrite par Senso. Dans un retour vertigineux au premier tome de la pentalogie, le lecteur découvrira enfin l'horrifiante "pièce rouge" qui correspondait à la "fenêtre-de-trop". C'est dans ce lieu magique et tragique que se révéleront enfin tous les mystères et les drames familiaux.

Fantasy historique/uchronique de grande ampleur, roman initiatique pour adultes, car si ses personnages principaux sont des enfants qui grandissent et qui deviennent de jeunes adultes dans le dernier tome, ces romans ne sont pas pour autant à mettre entre toutes les mains, cette pentalogie a un souffle exceptionnel. Bien sûr, on y retrouve les thèmes chers à l'écrivaine québécoise, qui étaient déjà apparus notamment dans sa pentalogie Tyranaël (les talents, la longévité, la différence...), mais, ces romans se déroulant sur notre propre planète, l'ampleur de vue est encore plus évidente. En effet, trop souvent les auteurs de fantasy se bornent à un seul continent, voire à un seul pays. Là, c'est l'entièreté du monde qui est décrite, avec une Histoire, des Histoires, alternatives parfaitement crédibles, même si certaines parties du globe ne sont qu'évoquées (telles que l'Australie, par exemple). C'est également, et de façon encore plus évidente que Tyranaël, toujours du fait qu'il est situé sur notre planète, un roman sur la colonisation et sa fin.

C'est la description d'un autre univers possible, où la place de la femme est totalement différente, où les relations entre l'Eglise et l'Etat sont différentes, où même les religieux sont capables d'interroger leur foi. Et comme ce n'est pas une utopie, c'est aussi un univers où les humains commettent des erreurs, voire des crimes, s'aveuglent, s'enragent, et ravagent ce et ceux qui les entourent. L'amour et le respect évident que porte l'autrice à ses personnages - même ce "vrai méchant" qu'est Gilles - en fait des êtres cohérents et crédibles, à qui on souhaite le meilleur, enfin, après ces centaines d'années et de pages mouvementées.

Les lecteurs intéressés par cette pentalogie, et par ses liens avec Les pierres et les roses, la trilogie en cours de l'auteure, sont invités à lire ce qu'elle en dit dans une interview ici.