Depuis la fin de la guerre contre les Pirates Rouges, quinze ans plus tôt, FitzChevalerie Loinvoyant n'est jamais retourné à Castelcerf. Le "bâtard au Vif" est officiellement mort. Après quelques années d'errances, celui qui se fait désormais appeler Tom Blaireau s'est établi dans une cabane en forêt, où il vit une existence rustique et solitaire en compagnie de Heur, un orphelin qu'il a adopté. Il est usé aussi bien physiquement que mentalement, et Oeil-de-Nuit, sou loup de Vif, accuse lui aussi les signes de l'âge. L'appel de l'Art le dérange souvent, mais il est globalement satisfait de sa petite vie tranquille, loin des intrigues de la cour.
C'est pourquoi il n'a aucune peine à résister à son ancien mentor Umbre, qui lui rend une visite impromptue dans l'espoir de le convaincre d'enseigner l'Art au jeune prince Devoir. C'est un autre vieil ami, le Fou, qui se présente ensuite : Les temps changent, et le Prophète Blanc est convaincu que son Catalyseur va bientôt se retrouver à nouveau au cœur de la tourmente. Quant à Heur, il est temps pour lui de trouver un apprentissage et ses souhaits le portent vers la capitale. Tout concourt à faire sortir Fitz de sa retraite tranquille...
Dans le premier cycle de L'assassin royal, Fitz n'était qu'un jeune homme. Dans ce deuxième cycle, c'est désormais un homme fait, plus mâture, qui tente de se persuader qu'il a fait les bons choix de vie. Il ne connait aucun des deux enfants qu'il a engendré, tous deux ignorant le secret de leur naissance. Sa fille Ortie coule une vie paisible auprès de Molly et Burrich, et Fitz se refuse à briser leur bonheur en se révélant à eux. Le prince Devoir, héritier du roi Vérité, possède aussi bien l'Art que le Vif, comme son père biologique, mais Fitz refuse de s'en mêler. Il se sent vieux et fatigué, trop las pour ébranler son train-train quotidien. C'est toujours un homme à l'âme torturée, mais d'une manière moins violente, à l'image d'une petite gêne au quotidien.
J'avais parfois été lassée par les longs auto-apitoiements larmoyants de Fitz plus jeune. Rien de cela ici. Pourtant, il ne se passe globalement pas grand chose dans ce tome, qui introduit très doucement le deuxième cycle. Mais malgré ce rythme très lent, l'écriture talentueuse de Robin Hobb nous emporte sans coup férir, et ce roman est finalement très vite avalé.
Les amateurs de l'autrice qui n'ont pas encore découvert ce cycle peuvent se lancer dedans les yeux fermés. Pour ma part, je me demande encore comment j'ai pu attendre aussi longtemps avant de m'y plonger !