Harvey Swick s'ennuie. Désespère. Ce mois de février n'en finit pas. Du vent, de la pluie, de la glace. Et, il faut sortir pour aller à l'école. Braver le froid et la grisaille. Harvey Swick se meurt.
Lorsqu'un drôle de bonhomme, le visage éclairé par un large sourire, lui propose d'aller passer un peu de temps dans une maison de vacances en dehors de la routine et au soleil, Harvey Swick change de route et traverse le brouillard. Bybye, Millsap.
Le soleil brille. Réchauffe son visage. Enfin, une belle journée de vacances. Il se fait directement de nouveaux amis et hume avec grand plaisir les bonnes odeurs qui s'échappent de la cuisine. Après cette sortie au jardin, les pieds dans le gazon chaud ? Il est temps de préparer les déguisements pour Halloween ! Et puis, on se dépêche, c'est la Noël avec des cadeaux et des friandises qui arrive à grands pas !
L'ennui, c'est terminé. Pour l'éternité.
A côté de son œuvre littéraire adulte et son boulot au cinéma, Clive Barker a sorti un bouquin pour un public jeunesse, Le voleur d'éternité, annoncé même comme une fable en version originale. Je vous rassure immédiatement, on est loin des animaux amateurs de fromage de La Fontaine et des codes stylistiques de ce genre. Ce livre est une histoire à l'atmosphère horrifique commune. On y suit Harvey à la découverte de la maison enchantée, puis dans ses tentatives (vous vous en doutez) d'évasion.
C'est un peu par hasard que j'ai mis la main sur ce roman. Je n'avais plus lu Barker ces dernières années. La lecture de Le voleur d'éternité m'a laissé étonnamment froid.
L'écriture n'est pas mauvaise, loin de là. Les différents éléments de l'histoire, pris individuellement, sont bien réalisés. La prose de Barker est fine et se lit avec fluidité. Le décor se met joliment en place. Sans effort. Le rythme est là, entêtant. Enfin, les dessins, de la main de l'auteur, sont parfaitement désagréables, histoire de bien faire peur aux enfants lecteurs.
Malheureusement, le mélange ne prend pas. Harvey m'ennuie (chacun son tour). Difficile, dès lors, de s'enthousiasmer sur les chances de sortie de ce petit gars. Si l'ambiance développée par Barker est enchanteresse lors des premiers tours de saison dans la maison, elle retombe vite. Elle attrape un côté mécanique un peu forcé. Et commence à grincer lors du second voyage d'Harvey, d'autant que l'argumentaire de l'auteur (le "il faut aimer sa famille même si par moment on s'ennuie") nous est balancé hors de nulle part. En particulier pour un gamin qui, parce qu'il fait moche et qu'il n'a pas envie d'aller à l'école, suit le type louche dans la rue.
Bref, Le voleur d'éternité est rempli de bonnes choses qui, ensemble, manquent de goût. Ne le snobez pas, toutefois, Le voleur d'éternité se lit vite et mérite de figurer au palmarès des amateurs de Barker.