Robert Luczak est un journaliste et prof de littérature qui vient de toucher le gros lot. Le magazine Harper's l'envoie en mission à Calcutta pour récupérer le nouveau recueil de poèmes de l'Indien Das, un auteur disparu depuis des années, dont la mort ne faisait plus beaucoup de doutes.
Son épouse est Indienne d'origine, Das est un génie et cet immense pays l'a toujours attiré.
Mais sur place, Calcutta n'a rien de la mauvaise image véhiculée par les touristes et les lépreux : C'est pire.
Les contacts indiens ne sont pas fiables, tardent à fournir le livre pour lequel Luczak a fait le voyage... Il essuie des refus secs chaque fois qu'il demande à rencontre Das. Son retour pue l'escroquerie.
Chaque jour sur place donne moins de satisfaction et plus d'histoires ridicules. Chaque jour, entre la mousson, la chaleur assommante et la crasse, Luczak déchante. Chaque jour, il comprend mieux l'avertissement de son associé.
Ne mets pas les pieds à Calcutta.
Le chant de Kali est le premier roman de Dan Simmons. Un livre que j'avais lu dans une édition précédente, il y a une quinzaine d'années, et dont je gardais souvenir flou mais persistant, quelque part entre Indiana Jones : Le temple maudit de Spielberg (sans les scènes d'action) et une ambiance à la Lovecraft.
Ça m'a fait plaisir de relire Le chant de Kali pour lequel je mettrais deux éléments sur un piédestal (catégorie réussite géniale) : son atmosphère et sa tension. L'une va avec l'autre.
Calcutta la crasseuse est un personnage à part entière dans ce récit. Sans elle, Kali ne se réveille pas. Elle bouge, elle vit, son mouvement est implacable, à des années lumières de ce que nous, Occidentaux, connaissons. Ses miasmes, son désespoir, ses averses, ses déchets humains, sa corruption, sa touffeur prennent à la gorge. Ne lâchent pas. Ne lâchent jamais. Calcutta donne envie d'aller se récurer sous la douche, de refaire ses vaccins. Elle angoisse. Elle crée les ténèbres. Elle ronge ses habitants et ses visiteurs. Elle produit une atmosphère terrible et désagréablement captivante. Elle s'insinue en nous. Se colle à notre peau. On ne la quitte pas indemne.
Simmons est un formidable conteur et constructeur d'histoires. Pour un premier bouquin, c'est un tour de force de sa part. Son texte, ses acteurs (à l'instar de Nuit d'été ou des Chiens de l'hiver, je suis immédiatement à l'aise avec ceux-ci, comme de vieux amis) et son rythme sont brillants.
Le chant de Kali est une perle. Tenace. Poignante. Noire. Cauchemardesque.