Après les événements racontés dans La Plaie, les héros sont fatigués. C'est ainsi que l'armada prévue pour libérer la Terre est regroupée autour d'Omicron, en attendant on ne sait trop quoi. Peut-être le retour d'Airth Reg, car tout recommence à bouger dès qu'il arrive, à bord de son Scorpion. Il raconte à Carolus Lès qu'il a été torturé sur une Terre, non sans y apprendre comment vaincre les Nocturnes, et que leur sort à tous dépend de la fragile Albane. La rencontrant sur Omicron, il la confie à Thalestra. En apprenant de celle-ci qu'elle l'a perdue, il repart, cette fois à destination de la véritable Terre.
S'il est un roman auquel le terme "space opera", avec insistance sur le second terme, s'applique, c'est bien celui-ci. On y trouve en effet des planètes, des vaisseaux, des vitesses supra-luminiques, des robots et des non-humains, sans parler d'un conflit méta-galactique entre le bien et le mal. S'il est un roman auquel le terme "space opera" ne devrait pas être appliqué, c'est bien celui-ci. L'espace y semble beaucoup plus intérieur, et peuplé de cauchemars, qu'extérieur. Les non-humains semblent des déclinaisons différentes des anges et des démons. Le modèle littéraire cité par l'auteure est clairement La Divine Comédie de Dante, qui n'est pas franchement une référence scientifique, et je ne parlerai même pas des allusions à Goethe ou de l'atmosphère parfois inspirée par Poe ou Lautréamont. Et pourtant, je maintiendrai l'usage de ce terme, parce que je trouve fascinante et merveilleuse la diversité qu'il peut recouvrir, et dont ce roman est une illustration, dans tous les sens de ce terme.
C'est une excellente idée de l'éditeur que de l'avoir réédité, dans sa collection "poche", après La Plaie, dont il est une suite. D'abord, à cause de sa qualité intrinsèque, avec son style hors normes, échevelé, foisonnant, qui met en forme une imagination tout aussi riche, et d'une originalité digne d'éloges. Ensuite parce qu'il n'y a pas eu tant d'écrivaines femmes de science-fiction en France, surtout de la génération de Nathalie C. Henneberg, et qu'elle avait, bien sûr, été à peu près oubliée ; elle méritait amplement cette chance de trouver de nouveaux lecteurs. Enfin, ce style de roman, et de SF, fait partie de l'histoire du genre même, et la constitue, notamment en France. Il serait très dommage que l'influence américaine nous le fasse oublier. Tout cela fait que ce n'est pas un roman facile à lire, mais pour lequel il vaut incontestablement la peine de faire un effort.