Nous sommes en 1787. Nicolas Le Floch, marquis de Ranreuil, est en Bretagne en famille, où il a assisté à la naissance de son petit-fils, et en profite pour se reposer et parcourir ses terres. C'est lors d'une de ses promenades qu'il est victime d'une tentative d'assassinat. Il en réchappe grâce à Pluton, son chien, qui a mordu l’agresseur et lui a arraché un bout de vêtement où se trouve un mystérieux papier avec des idéogrammes chinois. Alors qu'il revient de cette promenade, un émissaire, Gilles Cholet, l'attend avec un message le convoquant à Paris de toute urgence. Accompagné de celui-ci, Nicolas prend la route. Un étrange moine les arrête en chemin mais il est abattu par Cholet sans sommation. Après la fouille du corps, il n'y a aucun doute qu'il s'agit bien de celui qui a tenté de le tuer.
En discutant avec son sauveur, il comprend vite que c'est Sartine, son ancien supérieur, qui l'a envoyé pour le protéger. De retour à Paris, ce dernier lui apprend qu'il est menacé et que l'on veut attenter à sa vie. Peu de temps après, Nicolas découvre avec plaisir que son ami de jeunesse Pigneau de Behaine, devenu évêque, est de retour en France pour négocier au nom du roi de Cochinchine un traité commercial avec le royaume. Il le retrouve après toutes ces années et en profite pour lui demander des éclaircissements sur le papier ramené par Pluton. Pigneau lui révèle alors qu'une mystérieuse triade tente d'empêcher la signature du traité et que l'on menace la vie du jeune prince de Cochinchine qui l'accompagne.
Plus tard, Gilles Cholet est assassiné et le commissaire Le Floch est soupçonné, embastillé puis enlevé et enfin torturé avant d'être sauvé d’extrême justesse par ses amis.
Nicolas est tombé dans un piège machiavélique où se mêlent les ennemis de la France, la triade, et de vielles rancœurs personnelles.
Lors de cette enquête, le mystère s'épaissit jour après jour, les témoignages sèment le trouble, les rebondissements, les fausses pistes et les assassinats perturbent plus encore notre héros et le laissent perplexe. Jamais au cours de ses aventures il n'aura autant mérité son titre de "commissaire aux affaires extraordinaires" que lors de la résolution de cette intrigue où se croisent la diplomatie, les meurtres, le vol et les conspirations politiques.
Ce sont malheureusement les dernières aventures de Nicolas Le Floch car Jean-François Parot nous a quittés l'année dernière. Nous ne saurons donc jamais comment il aurait fait évoluer notre héros au moment de la révolution et ce qu'il serait advenu de lui et ses amis durant cette période troublée.
Il ressort de ce dernier tome une certaine noirceur, c'est un Nicolas vieillissant qui se questionne sur le temps qui passe et s'interroge sur la société dans laquelle il vit, sur son évolution et les changements à apporter. Une fois de plus, les échanges seront nombreux sur ce sujet entre lui et son second, Bourdeau, partisan de Rousseau et d'idées révolutionnaires. Quant à notre commissaire, il est partagé entre ses origines prestigieuses et le milieu où il a été élevé. Conscient qu'un changement est nécessaire, il le craint pourtant, car il connaît la folie des hommes et l'emportement des foules ainsi que les désordres et exactions que cela peut engendrer.
Encore une fois, Parot, grâce à son travail de recherche, nous plonge au cœur du quotidien des Français de l'époque et par des faits historiques arrive à construire une intrigue qui nous tient en haleine du début jusqu'à la fin. On ressent le bouillonnement des idées de ce siècle des Lumières, les sentiments partagés des différents protagonistes et leurs craintes devant cette société inégalitaire au bord du gouffre et qui tarde à évoluer.
On y croise aussi des personnages historiques tels qu'Olympe de Gouges et Restif de la Bretonne qui laisseront des traces dans notre histoire mais aussi Pigneau de Behaine auquel l'histoire personnelle de Parot est mêlée.
Sans oublier la touche personnelle de l'auteur, fin gourmet, avec les nombreux repas partagés par les protagonistes qui me donnent toujours envie de tester les recettes !
Merci à Jean-François Parot pour toutes ces années de lecture à attendre la sortie du prochain tome, pour ces quatorze aventures qui m'ont fait redécouvrir ce dix-huitième siècle, pour ces intrigues toujours bien ficelées et pour sa galerie de personnages que je retrouvais toujours avec plaisir.