Les Chroniques de l'Imaginaire

L'Envolée des Enges (L'Envolée des Enges - 1) - Krust, Claire

Le bonheur des Enges, c'est de voler dans les cieux, immatériels, portés par des vents amis, sans s'inquiéter de ce qui se passe sur la terre ferme. Leurs enfants, qui n'ont pas encore acquis leurs ailes d'or et donc leurs pouvoirs, ressemblent beaucoup à des humains. Ils vivent livrés à eux-mêmes sur un immense Pilier qui s'élève loin au dessus du sol, en sécurité, en attente. La cérémonie de l'Envolée marquera leur passage à l'état adulte et leur permettra, vers vingt ou vingt-cinq ans, de rejoindre définitivement leurs aînés.

Mais si les Enges ne s'intéressent guère aux autres peuples, la réciproque n'est pas vraie. Tandis que les Enges regardaient exclusivement le ciel, les hommes ont patiemment construit un immense échafaudage pour faire l'ascension du Pilier. Ils débarquent en force, éliminant tous les jeunes Enges.

Seule Céléno parvient à réchapper du massacre. Paria parmi les siens pour avoir commis un crime, elle avait choisi de s'isoler des autres par fierté, mais le génocide éveille en elle un prodigieux désir de vengeance. Là voilà propulsée dans le monde des hommes, dont elle ne sait rien et où elle va devoir survivre, alors qu'elle n'est encore qu'une enfant qui ne s'est pas réellement approprié le pouvoir de ses ailes...

Quand on ouvre les pages de cet ouvrage à la jolie couverture très évocatrice, Claire Krust nous plonge dans un monde fantasy violent et amer. L'action se passe sur une péninsule isolée du reste du monde depuis un cataclysme si grave qu'on compte désormais les années à partir de cet événement. Dans cet espace trop étroit vivent les hommes mais aussi les enfants d'Hélias - Enges, Êtres de l’eau et Elbes -, sans compter quelques créatures mythiques comme les Métamorphes ou les Empathes. La différence, d'abord acceptée, a fini par générer le rejet et la violence.

Dans une première partie, le récit suit de jeunes Enges qui vivent en haut du Pilier : Eole, prêt à s'Envoler, déjà vibrant de la puissance qui l'attend, et sa tendre compagne Borée ; puis Céléno la solitaire, contrainte à grandir d'un coup sans préparation. Ce n'est pas la partie que j'ai préférée, la vie des Enges au début étant trop lisse, les aventures de Céléno trop vite survolées.
Par contre, je suis vraiment rentrée dedans en attaquant la deuxième partie, et je n'ai plus pu lâcher le roman. On y découvre un jeune homme, Arhan, qui n'est pas un enfant d'Hélias malgré ses yeux multicolores. Vendu par ses parents, le servant est accablé d'une dette si astronomique envers son maitre qu'il n'a aucun espoir de la régler grâce au fruit de son labeur. Pour retrouver un jour sa liberté, Arhan a donc choisi de se livrer à des activités illégales mais lucratives. Qui ne sont pas sans danger, comme le pauvre garçon va le découvrir à ses dépens au fur et à mesure que les choses vont mal tourner pour lui sans qu'il puisse enrayer le sort... Arhan est un garçon vraiment intéressant et attachant, et j'ai hâte de savoir ce qu'il va advenir de lui.

Mais ça, ce n'est pas pour tout de suite, puisque L’Envolée des Enges est la première partie d’un diptyque. Les révélations nous seront faites dans le second tome, intitulé Les Secrets d’Éole, qui devrait paraître cette année. Nous restons donc pour le moment avec plus de questions que de réponses, notamment sur le passé des différents personnages : qu'est-il arrivé précédemment à Céléno, au "lâche", à Sujin l'Être de l'eau, pour qu'ils soient devenus les personnes ambiguës que nous découvrons ici ? Quels choix vont-ils faire ?

Le style est maîtrisé, agréable à lire. L'univers est intrigant, le mélange d'action et de réflexion savamment dosé. Bref, c'est une réussite et j'attends impatiemment de découvrir la suite et fin !