Les Chroniques de l'Imaginaire

L'exil (Kayla Marchal - 1) - Vagner, Estelle

Kayla Marchal est une orpheline élevée par son grand-père et par sa tante en plein cœur des montagnes vosgiennes. La jeune femme est également une morphe. Comme tous les membres de son clan, elle devrait pouvoir se changer en loup. 

Malheureusement, à l’âge de dix-huit ans, sa première mutation n’est toujours pas arrivée. Le harcèlement physique et moral des autres membres du clan devenant insoutenable, son grand-père, l’alpha de la meute, la met à la porte. Hors de question pour elle de revenir tant qu’elle n’aura pas muté.

Kayla est dévastée. Son grand-père avait juré à sa mère de la protéger coûte que coûte et voilà qu’elle se retrouve loin de la seule famille qu’il lui reste. Elle décide de se rendre à Nancy pour commencer, elle qui n’a jamais vécu dans une ville. La jeune femme ne tarde pas à y être accostée par les morphes lupins locaux et présentée à leur alpha, Henri Berger. Elle apprend avec surprise qu’Henri et sa femme Isa ont bien connu sa mère, dont elle-même ne se souvient plus. Elle accepte donc avec plaisir lorsque ceux-ci lui proposent de loger chez eux quelques temps et lui offrent même un travail dans un bar étudiant. 

La jeune femme réalise qu’elle pourrait enfin être heureuse dans un tel environnement, à condition que les Berger n’apprennent pas son absence de mutation. C’est aussi sans compter l’attirance qu’elle ressent pour plusieurs hommes à la fois : Jeremiah, un rustre qui la met dans tous ses états sans qu’elle le veuille, Ian, le fils de l’alpha débordant d’orgueil et d’attentions pour elle, et le mystérieux Max, le morphe renard et bras droit d’Henri. Un problème encore plus sérieux émerge lorsque la demeure des Berger est saccagée et que des loups étrangers sont aperçus sur le territoire du clan.

L’exil est le premier tome de la série Kayla Marchal dont l’action se situe dans les Vosges. Les séries de bit-lit francophones prenant place en France sont trop rares pour que cela ne soit pas noté ! Je n’ai rien contre les auteurs francophones situant leur action à l’étranger. Au contraire, j’adore être dépaysée, surtout lorsque lesdits auteurs connaissent bien le pays en question. Malheureusement, cela cause certaines fois des décalages culturels (comment expliquer des références franco-françaises lorsque les personnages sont tous américains et n’ont jamais quitté le Midwest ?) voire des descriptions de lieux hasardeuses. Sur le fond, le fait que cette série se déroule dans les Vosges ne change pas grand-chose si ce n’est que les références culturelles françaises sont donc plus crédibles et qu’on sent que l’auteure, Estelle Vagner, connaît certains des lieux qu’elle dépeint. 

Le style d’écriture d’Estelle Vagner est d’ailleurs agréable. L’auteure met l’accent sur le ressenti de sa narratrice et personnage principal, Kayla, complètement déboussolée. Cela donne donc un style très parlé mais authentique et qui confère une vraie personnalité à la jeune morphe. J’ai d’ailleurs beaucoup apprécié son tempérament : celui d’une jeune fille tâchant de se montrer forte face aux épreuves mais constamment au bord du gouffre émotionnel entre sa puberté humaine bien présente, celle morphe qui ne semble pas venir, l’abandon de sa famille, le mystère entourant le passé de sa mère…

J’ai au départ été un peu lassée par l’abondance d’hommes magnifiquement séduisants faisant irruption dans la vie de Kayla. Heureusement, cela se calme un peu à mesure que le roman progresse. Ces hommes restent décrits comme canons mais l’emphase est davantage portée sur leurs personnalités respectives et leurs interactions avec Kayla. L’intrigue comporte également quelques personnages secondaires féminins, heureusement tout aussi travaillés que leurs homologues masculins.

Le rythme du récit est bien mené. Kayla a de multiples préoccupations et passe d’un motif d’inquiétude à un autre sans véritable répit. Bien entendu, l’importance de ces problèmes va crescendo au fur-et-à mesure du récit, de l’angoisse de se rendre en boîte pour la première fois à une confrontation physique de taille. Le dénouement lui-même finit en pleine action et sur des révélations qui ne font qu'aiguiser l'intérêt pour le tome 2.

Pour conclure, je peine à croire qu'il s'agit du premier roman de l'auteure. L'exil est un très bon cru en matière de bit-lit young adult. Vite, la suite !