Les Chroniques de l'Imaginaire

Le marteau des sorcières (Le bâtard de Kosigan - 3) - Cerutti, Fabien

Déterminé à en apprendre davantage sur les secrets de sa naissance, Pierre Cordwain de Kosigan entraîne sa compagnie de mercenaires à Cologne, dans le Saint Empire Germanique. Il espère obtenir des informations sur sa mère auprès de puissantes sorcelières, le Cénacle Lunaire. Le hic, c'est qu'en cette année 1341, cela fait déjà plusieurs mois que la ville est sous le joug de l'Inquisition. A sa tête, le cardinal de Las Casas, connu sous le sobriquet évocateur de "marteau des sorcières", compte bien torturer et tuer jusqu'à plus soif, tant qu'il n'aura pas éliminé lesdites sorcelières et autres ennemis de la foi... Kosigan, avec le sang-noir qui coule dans ses veines, va devoir rester particulièrement sur ses gardes !

Cinq siècles plus tard, son descendant Kergaël de Kosigan essaie également de découvrir les mystères qui entourent son ancêtre et lui-même. Aidé de quelques amis universitaires, il avance sur les traces laissées par la société secrète de l'Arche. Une explication commence à se faire jour pour éclaircir pourquoi et comment la magie (et les créatures fantastiques et tutti quanti) pouvait être considérée comme commune dans les écrits de Pierre de Kosigan, alors qu'elle est absente du quotidien de Kergaël. Une théorie totalement incroyable de prime abord, mais que Kergaël et ses collègues sont de plus en plus disposés à croire...

Comme précédemment, le roman suit en parallèle les deux trames temporelles. L'intrigue autour du Bâtard est la plus importante et présente elle-même plusieurs couches. Si Pierre de Kosigan se rend à Cologne sur les pas de sa mère, il n'oublie pas les affaires pour autant. Officiellement, il est là pour enquêter sur la disparition de caravanes qui ne sont jamais arrivées, à l'initiative de l'herzog (duc) Dagmar Von Hohenstauffen. Il lui a également promis de le débarrasser de l'Inquisition. Et comme il aime bien recevoir double paye pour une même besogne, il fait également cette promesse à un autre commanditaire... Politique, manipulations, double-jeu sont une fois encore au rendez-vous d’un récit sans temps mort, dans une atmosphère plutôt sombre. On ne connaît pas encore tous les tenants et aboutissants, mais l'intrigue reste aisée à suivre, malgré sa complexité.

A l'accoutumée, le Bâtard se révèle malin et calculateur, charismatique, audacieux, séducteur... et également faillible, ce qui le rend très humain. Au fil de la narration à la première personne, on rentre parfois également dans les pensées de ses collaborateurs, ce qui apporte une touche bienvenue tout en enrichissant le décor.

La langue est soutenue, et Fabien Cerutti se plaît à employer un vocabulaire qui sonne médiéval (termes désuets, tournures d’époque...), mais sans trop en faire : c’est très plaisant à lire et nous plonge dans l’ambiance. De même d’ailleurs que certaines répliques en allemand, qui confrontent le lecteur au même problème de compréhension que les mercenaires français qui ne sont pas très au fait de cette langue employée dans le Saint Empire Germanique, eux qui usent habituellement du latin comme nombre d’Européens de l’époque.

La deuxième intrigue, au XIXème siècle, est relatée dans des chapitres plus courts. Elle est principalement traitée de manière épistolaire (lettres entre les protagonistes, comptes rendus d'appels téléphoniques...), genre que je n'apprécie guère et qui explique peut-être que je n'adhère pas trop à ces péripéties-là. Pourtant, il y a matière à intérêt : le danger est de plus en plus présent (espionnage, sociétés secrètes, enlèvement…), faisant monter le suspense.

Dans cette aventure, Pierre Cordwain de Kosigan aussi bien que son héritier Kergaël ont affaire à forte partie. Les secrets commencent à prendre forme… et cette forme est énorme, quelque chose qui dépasse l’imaginable. On voit se rapprocher les deux récits des deux époques. Pourtant, pour connaître le dénouement, il va falloir attendre le tome suivant, intitulé Le Testament d’involution, car Le marteau des sorcières finit en pleine action, laissant les personnages en situation critique. Dommage, j’aurais bien aimé enchaîner sur la suite pour enfin lever le voile ! En tout cas, si vous avez aimé les tomes précédents, n’hésitez pas à lire celui-ci, il saura vous apporter les mêmes réjouissances !