Les Chroniques de l'Imaginaire

La chanson d'Annie - Anderson, Catherine

Annie est la benjamine d’une riche famille américaine à l’orée du XXe siècle. À la suite d’une maladie durant son enfance, le comportement d’Annie a changé et toute sa famille la considère désormais comme attardée. C’est sans instruction et sans réel amour qu’elle grandit. Un jour qu’elle se trouve dans les bois, Annie se fait violer par Douglas Montgomery, petite terreur locale. L’affaire est étouffée par la famille d’Annie afin d’éviter un scandale. 

Le frère aîné de Douglas, Alex, se sent responsable des mauvaises actions de son frère car il l’a trop couvé à la perte de leurs parents. Lorsqu’il découvre qu’Annie est tombée enceinte, Alex décide donc de l’épouser pour éviter que l’enfant, dont la naissance risquerait de causer elle aussi scandale, ne se retrouve dans un orphelinat. Il découvre peu à peu les raisons de l’étrangeté d’Annie, qui n’est peut-être pas aussi stupide qu’on le croit.

Ce roman commence par une scène assez violente : le viol d’Annie, qui, en plus, ne comprend rien à ce qui lui arrive. Car sans être idiote, Annie n’a jamais reçu aucune éducation. Elle ne comprend pas plus qu’elle est enceinte et juge les réactions de sa famille face à sa prise de poids disproportionnées. L’alternance de la narration entre le point de vue d’Annie et celui d’Alex nous permet vite de réaliser pourquoi Annie est prise pour une simple d’esprit mais aussi qu’elle ne l’est pas. L’origine véritable de ses troubles du comportement n’apparaît qu’au bout de quelques chapitres et est à mon sens très bien trouvée ! J’aurais peut-être préféré que le doute sur les facultés mentales d’Annie dure plus longtemps mais sa condition réelle et ses conséquences méritent d’être traitées en profondeur.

Sans trop en dévoiler, il s’agit d’un état de santé tout à fait compatible avec la survenue d’une histoire d’amour et, même s’il n’y en a pas beaucoup, de scènes à caractère sexuel. Je dois avouer qu’il s’agissait d’une de mes craintes à la lecture du résumé, qu’Annie ne soit effectivement pas adulte dans sa tête, ce qui aurait posé un problème au vu de la nature de cette collection. À part la scène introductive et quelques allusions à de mauvais traitements, ce roman n’est pas non plus particulièrement violent. Seules quelques allusions au caractère enfantin de la protagoniste m'ont paru déplacées dans le contexte d'une romance.

Il est difficile d’en dire plus sans tout divulguer. Les deux personnages principaux sont bien campés, particulièrement celui d’Alex. Ce dernier va s’ingénier à trouver des solutions pour Annie, à lui enseigner ce qui lui manque et ne va même pas hésiter à mettre de côté son bonheur personnel pour faire le sien. Tout le contraire en somme de la famille d’Annie qui, obsédée par ses ambitions politiques, est passée à côté de la nature véritable de son état de santé.

La chanson d’Annie est donc une très belle histoire d’amour, d’acceptation de la différence et de rédemption. Elle a tout à fait sa place dans la sous-collection La bibliothèque idéale créée par J’ai lu pour distinguer les œuvres phares de sa collection Aventures et Passions.