A l'automne-hiver 1978/1979, Candice travaille et répète le rôle de Richard III dans la pièce éponyme de Shakespeare, dans une petite troupe de théâtre amateur, constituée uniquement de femmes. Elle passe le reste de ses journées à sillonner Londres à vélo pour livrer du courrier et de petits colis, job alimentaire qui lui permet de payer ses factures et ses cours d'art dramatique. Jones, lui, galère : il est au point mort dans la musique qu'il souhaite composer et il n'arrive plus vraiment à trouver du travail.
Pendant ce temps, sous la férule d'un Labour Party qui ne parvient pas à régler les problèmes de la population, qu'il s'agisse de chômage, d'éducation, de logement ou de santé, les Anglais grognent et débrayent de plus en plus. Et Margaret Thatcher entame sa marche vers un pouvoir décomplexé, qui ne se laissera entraver par aucune régulation, surtout pas sociale.
Le thème de ce roman est très intéressant. Il est indubitable que l'origine de nos credos politico-économiques actuels, et des problèmes correspondants, est à situer dans ces années-là. Par ailleurs, on ne peut qu'être sensible aux échos entre la Dame de Fer et certains dirigeants actuels, que ce soit dans leurs slogans ou dans leur attitude envers ceux qu'ils sont sensés gouverner en les représentant.
Pour autant, je ne suis pas arrivée à m'y intéresser. D'abord parce que je vois peu de liens entre un psychopathe qui arrive au pouvoir en massacrant les quelques personnes qui l'en séparaient et une personnalité politique qui y arrive de façon légale, même en rapprochant leurs points de vue - fort ressemblants en effet - sur le pouvoir et ceux qu'ils dirigent. Ensuite parce que je n'arrive pas à entrer dans un roman qui se déroule en Angleterre, mais où un personnage porte le prénom d'Albert "comme le prince de Galles" (qui s'appelle Charles !), qui prétend que huit pouces font douze centimètres (au lieu des vingt habituels), et qui utilise une référence hugolienne face à la procrastination d'un personnage. Par ailleurs, je n'ai pas vraiment cru aux personnages : la plupart ne font qu'une brève apparition utilitaire avant de disparaître.
Enfin, je n'ai pas retrouvé l'ambiance de l'Angleterre à ce moment-là. Le roman se déroule majoritairement à Londres, où sont les grands organes de presse, et ce roman me semble une bonne illustration de l'écart, qui n'a cessé de se creuser depuis, entre la perception "en direct" d'un événement vécu et son compte rendu par la presse et les médias en général. En effet, dans la petite ville anglaise où je vivais, je n'avais eu aucune difficulté à trouver un petit boulot dans une usine où il n'y a pas eu de grève, et où mes collègues ouvriers et ouvrières ne parlaient pas du tout de la crise en cours.
Sans doute ce livre sera-t'il davantage apprécié par des personnes de la génération de l'auteur, ou plus jeunes, qui n'ont pas vécu la période décrite.