Les Chroniques de l'Imaginaire

Le grimoire glouton (Danthrakon - 1) - Arleston, Christophe & Boiscommun, Olivier

Nous sommes dans la cité de Kompian, en compagnie du chef cuisinier Rumbopöh et de son jeune commis, Nuwan. Les deux cuisiniers ont la charge quotidienne de nourrir le mage Waïwo, pour qui ils travaillent, ses trois élèves que sont Lerëh, Didore et Garman, et le personnel de maison. Et ce matin, ils vont assister à une scène étrange : l'inquisiteur Amatu et ses hommes ont réussi à coincer une créature rebelle, qui a tenté de se sauver en invoquant la magie du sang. Mal lui en a pris, car l'inquisiteur Amatu lui-même a invoqué la même magie et a tué, de façon sanglante, le rebelle en question...

La magie sanglante est interdite, et cela la belle Lerëh le sait bien. Elle l'a dit à Nuwan, à qui elle apprend les rudiments de la lecture et de l'écriture, le soir après les cours de magie. Le jeune Nuwan ne compte ainsi pas rester commis toute sa vie, et il faut dire qu'il est bien agréable de rester seul, le soir, avec la jolie et gentille Lerëh...

Pour autant, tous les élèves de Waïwo n'ont pas la gentillesse de Lerëh. Notamment, Didore est un gosse de riche, prétentieux au possible, et il a du mal à comprendre l'attachement de Lerëh pour un simple commis d'office. Mais Didore est loin d'avoir l'intelligence de Lerëh, et il lui arrive d'ailleurs, comme aujourd'hui, d'être relégué aux cuisines, afin de réfléchir à ses derniers propos... Didore a refusé de travailler sur la traduction d'un livre de magie très rare, le Danthrakon. Un livre récemment récupéré par le mage Waïwo, et qu'il est bien difficile de comprendre.

Il faudra attendre un soir, où Nuwan se retrouve seul dans le laboratoire de Waïwo, à la fin d'un cours de lecture avec Lerëh, puis s'approche du Danthrakon avec Tinpuz, son fuff de compagnie, pour que le livre se mette à prendre possession du jeune commis. Nuwan sait lire le Danthrakon, suite à cela, et toutes les pages de ce dernier sont totalement vidées de leur contenu. L'encre qui s'y trouvait semble maintenant se trouver dans le sang de Nuwan, qui se met aussi à suer et à pisser de l'encre... Un lourd secret qu'il ne pourra pas cacher bien longtemps, d'autant que Didore ne s'est pas gêné pour aller raconter cette histoire à l'inquisiteur Amatu...

Ce premier tome de Danthrakon a plusieurs particularités qui ne sont pas négligeables ! D'abord, il s'agit de la première collaboration entre Christophe Arleston au scénario (papa de Lanfeust de Troy, entre autres, s'il fallait le rappeler) et Olivier Boiscommun au dessin (La Cité de l'Arche, Le Règne...). Il est à noter que les couleurs sont ici réalisées par Claude Guth, qui colorise la plupart des albums d'Arleston chez Soleil (Lanfeust de Troy, Les Naufragés d'Ythaq, Sangre...). Un détail qui a son importance, car il n'est sans doute pas étranger à un côté graphique assez uniforme dans ces différentes séries, qui ont pourtant des dessinateurs différents.

Ensuite, ce premier tome est le premier album d'un nouvel éditeur, Drakoo, qui est en partenariat avec les éditions Bamboo, sans pour autant être une nouvelle collection, comme peut l'être Grand Angle par exemple. A noter que le directeur éditorial n'est autre que Christophe Arleston himself, et que deux autres albums arriveront pour cette rentrée 2019.

Pour ce qui est de Danthrakon, il est bien agréable en tout cas de se retrouver avec un nouvel album qui mêle de la fantasy et de l'humour : les personnages d'Arleston sont travaillés et le plus souvent attachants. Le parallèle avec d'autres séries d'Arleston, comme Lanfeust de Troy ou Sangre, peut vite être fait, mais la formule reste toujours aussi efficace et convaincante. L'originalité n'est pas forcément de mise avec ce premier album, mais il reste tout de même vraiment bien réalisé, et on peut même se dire que démarrer avec un album de cette qualité, pour une nouvelle maison d'édition, est une vraie force.

Les dessins d'Olivier Boiscommun sont nerveux et dynamiques, avec plein de mouvements, chose qui est sans doute due aux couleurs de Claude Guth. On n'a pas du tout ici l'aspect un peu figé qu'on pouvait avoir avec d'autres albums de ce dessinateur, aux couleurs très différentes. Les décors, les personnages et les costumes sont en tout cas travaillés, et j'ai également beaucoup aimé les ambiances maritimes où on pouvait faire la connaissance de Dreled, la fille qui a pu apporter le Danthrakon au mage Waïwo. Un personnage qu'on retrouvera de façon plus détaillée, à n'en pas douter, dès le tome suivant...

Ce premier tome de Danthrakon a donc des particularités très intéressantes, même s'il pêche par un manque d'originalité (et encore, cela ne sera pas du tout valable pour des lecteurs qui ne connaîtraient pas encore l'oeuvre de Christophe Arleston et ses mondes de Troy...). Il me tarde de voir le second tome, mais aussi les autres productions de ce nouvel éditeur qui pour le moment me fait, forcément, beaucoup penser aux éditions Soleil. Il va falloir réussir à se dissocier du monde créé par Mourad Boudjellal ! A suivre...