Les Chroniques de l'Imaginaire

Les Terres Interdites (Les pirates de l'Escroc-Griffe - 1) - Guillermou, Jean-Sébastien

Sur le Monde-Fleur, les mousquetaires noirs sèment la terreur sous les ordres du terrifiant Cardinal Vélin tandis que l’Amiral fantôme traque les derniers pirates sur les mers turquoises.

Caboche, jeune voleur de Port Guilache, s’enfuit de l’orphelinat militaire où il reçoit un entraînement de mousquetaire noir pour retrouver son père. L’homme, qu’il n’a jamais connu, serait parti en quête de Libertalia, la légendaire cité des pirates. Lorsqu’il croise la route de Bretelle, le capitaine de navire le plus poissard du monde, Caboche décide de s’embarquer à ses côtés. Il passe un accord avec lui : il l’aide à délivrer la Belle Lili des griffes des mousquetaires noirs et à trouver un fabuleux trésor tandis que Bretelle s’engage à lui délivrer des informations sur son père et à l’aider à le retrouver. Bien sûr, ce marché sera loin d’être facile à tenir pour Caboche : la Belle Lili est retenue à Pénitence, terrifiante forteresse dotée d’automates. Quant au trésor, il s’agit d’un noiretefact chéni situé dans les Terres Interdites, dévastées lors d’un cataclysme plusieurs millénaires auparavant et hostiles aux humains.

Ce premier tome des Pirates de l’Escroc-Griffe mélange plusieurs styles. Il contient bien sûr du folklore lié à la piraterie : des pirates, une cité légendaire, un amiral mort-vivant qui ne trouvera la paix qu’une fois les derniers pirates éliminés, des soldats du roi hostiles aux pirates, des mers brumeuses ou orageuses mortelles… Mais on y trouve aussi beaucoup d’éléments de fantasy traditionnelle, avec d’autres races comme des hommes iguanes, les Kazarsses, et des artefacts magiques. La science-fiction voire le steampunk sont également présents de manière plus subtile. Ce joyeux mélange fonctionne très bien. On découvre différents endroits marqués par l’une ou l’autre de ces influences au rythme des aventures des héros. Les terres interdites sont particulièrement bien dépeintes : nimbées d’une aura de mystère et de danger et peuplées de créatures d’un autre monde. 

L’ensemble du récit tourne en fait surtout autour des personnages de l’équipage, du Cardinal Vélin et de ses sbires. Si les « méchants » sont peu mémorables, les pirates sont attachants. Ils demeurent certes un peu stéréotypés mais on prend vraiment plaisir à suivre les aventures de Biceps, le géant narcoleptique, Obus, l’homme-canon schizophrène, Lili, la voleuse manchot, ou encore Gowan, le Kazarsse né libre. 

Les scènes d’action, qu’elles soient sur terre ou sur mer, sont bien écrites et le rythme du récit maîtrisé. Certains points de l’intrigue sont assez évidents pour le lecteur : le destin du père de Caboche est ainsi vite élucidé. Toutefois, d’autres éléments sont nettement plus inattendus. Il en va ainsi de la fin et de la nouvelle quête de Caboche, qui partent dans une direction pour le moins surprenante et donnent très envie de découvrir la suite de la série. 

Mention spéciale à la couverture, qui représente l’une des scènes la plus onirique – ou spectrale – du roman, alors même qu’elle a été réalisée à partir d’une banque d’images. Le livre comporte également une carte, réalisée par Laurent Boulanger, et à ma surprise, un dessin de l’Escroc-Griffe, de Frédéric Mahé. Un lexique des termes nautiques et de l’univers du Monde-Fleur complète agréablement l’ouvrage.

Les Terres Interdites plaira aux personnes à la recherche d’une lecture accessible et trépidante mais qui n’arrivent pas à se décider pour un genre précis.