Les Chroniques de l'Imaginaire

Pamphlet contre un vampire - Jomain, Sophie

Lors d’un été passé chez son père en Allemagne, Satine Müller se blesse à la jambe et est contrainte de rester alitée. Heureusement, cette sportive en herbe est également une passionnée de littérature. Elle décide donc de profiter de sa convalescence pour se consacrer à un projet personnel : détourner sa meilleure amie Carla de sa passion obnubilante pour les vampires. Et quoi de mieux pour ce faire que de rédiger un pamphlet contre ces « Don Juan moisis » et de le publier sur Internet ?

À la rentrée, Satine découvre la popularité inespérée de son texte. Celui-ci ne tarde cependant pas à lui poser des problèmes : casier détérioré, sac à dos rempli de papier toilette mouillé par les pro-vampires…Satine doit aussi faire face aux menaces des plus beaux élèves du lycée, qui veulent à tout prix qu’elle supprime son texte. Loin de se laisser intimider, Satine continue à alimenter son blog sur le sujet mais plus les menaces se font sérieuses, plus la lycéenne s’interroge sur la nature véritable de ces bellâtres et notamment de l’énigmatique Hugo Rivoire.

Pamphlet contre un vampire est un texte très marqué dans son époque d’écriture, le début des années 2010. Tôt dans le récit, l’auteure, via la narratrice, fait référence à la série Twilight et y fait par la suite des clins d’œil. N’ayant pas lu les livres de Stephenie Meyer, je ne saurais cependant dire jusqu’où va l’hommage. Car malgré l’hostilité de la narratrice à l’égard de ce type de littérature, cet ouvrage est bien plus un hommage qu’une critique mordante des textes young adult de surnaturel. L’auteure adopte un ton bienveillant à l’égard de ces récits et en reprend a priori les principales composantes : une jeune héroïne se voulant différente, une quantité non négligeable de bellâtres mystérieux tantôt menaçants, tantôt protecteurs.

Je n’ai pas totalement adhéré à cet ouvrage. Tout d’abord, en raison de son aspect daté qui ne concerne pas seulement la référence à Twilight mais aussi d’autres éléments de culture populaire disséminés dans le récit. La narratrice a un blog skyrock (déjà dépassé à l’époque du récit) et dira par exemple « C’est mon dernier mot Jean-Pierre. » Cela sera à mon avis incompréhensible dans quelques années. Ensuite, en raison de la narratrice elle-même. Satine ne s’exprime pas comme une lycéenne le ferait. Même à mon époque, certaines de ses réactions l’auraient directement cataloguée has been. Or, elle est dépeinte comme populaire et volontaire, ce qui détonne avec cette image. Je pense qu’il est très délicat de rendre le parler adolescent, d’autant plus qu’il est très fluctuant… mais dans ce cas, il faudrait peut-être privilégier le langage courant et éviter les références culturelles trop connotées. Satine m’a donc paru être une héroïne très peu convaincante. 

Sophie Jomain introduit des références au Dracula de Bram Stoker passé le premier tiers du roman, et se les approprie pour tisser des liens avec les récits plus récents sur ces prédateurs surnaturels, comme Twilight. C’est plutôt une bonne idée, même si j’aurais aimé que l’auteure ne se limite pas à cette œuvre très connue.

En creux, le récit interroge aussi le rapport à la sexualité, à l’amour, du consentement et de la transgression, thématiques chères aux récits vampiriques. 

Les fans de Sophie Jomain retrouveront son style d’écriture, fluide, et sa manière caractéristique et bienveillante de dépeindre les interactions familiales. Je leur conseillerai pour ma part de se pencher plutôt sur les Étoiles de Noss Head, si ce n’est pas déjà fait, et particulièrement sur les tomes centraux de cette série. 

Je pense que ce roman plaira aux amateurs les plus fervents d’urban fantasy young adult mais aussi aux amoureux de vampires à la recherche d’une lecture légère.