Nous sommes en hiver 1915, en France. Les troupes canadiennes sont arrivées sur le Vieux Continent il y a quelques semaines, et une troupe de soldats allemands, emmenée par un certain commandant Heinrich Von Schaffner, avance dans l'intérieur des terres. La troupe se retrouve nez à nez avec un tireur embusqué, qui déploie tout son savoir-faire pour abattre la troupe entière, grâce à un leurre. Odawaa est un guerrier qui a une mère française et un père Cree, et il vient de mettre un terme aux exactions de Von Schaffner...
Quelques semaines plus tard, le colonel Desjoyaux reçoit le capitaine Ernest Keating, pour lui faire part d'une mission à venir. Cela fait quelques semaines que des Allemands se mettent à piller tout ce que la campagne renferme d'objets de valeur, en y incluant les églises et les reliques que ces dernières contiennent. D'après Desjoyaux, les Allemands qui battent ainsi la campagne pour piller sont emmenés par un certain Von Schaffner. De quoi s'interroger : Keating sait parfaitement que l'Allemand en question a été abattu, il y a un mois, par Odawaa, ce fameux guerrier d'origine Cree...
Et si les Allemands pillent, c'est en compagnie de deux soldats français, déserteurs, que l'on se retrouve à présent. Chanteaume et Picot vont vite se faire arrêter par les soldats canadiens, particulièrement par les soldats d'origine indienne qu'ils ont dans leurs rangs... Et bientôt, alors que la guerre fait rage dans le pays, bien des regards vont se tourner vers un cor en ivoire, une relique qui fait écho à Charlemagne. De quoi complexifier encore la tâche d'Odawaa, mais aussi de tous ceux qui le recherchent...
C'est à Cédric Apikian (au scénario) et Christian Rossi (au dessin, avec des couleurs de Walter) que l'on doit ce one-shot, La ballade du soldat Odawaa, qui paraît aux éditions Casterman. C'est ainsi un véritable plaisir de retrouver les dessins pleins de finesse de Christian Rossi (West, Deadline...), au milieu des tranchées et des champs de bataille de la Première Guerre Mondiale.
Apikian travaille son récit autour de l'histoire de quelques soldats canadiens, aux origines indiennes. Parmi eux, le fameux Odawaa, librement inspiré de personnages réels, nous est présenté dans une première scène qui glace le sang, et qui fait ressortir toute la tension et le réalisme dont est capable un dessinateur comme Christian Rossi : c'est beau, tendu à l'extrême, et cela nous plonge directement dans cette histoire.
Puis, le récit s'articule autour de soldats allemands qui pillent les églises et les maisons locales, perpétrant de sordides massacres. De quoi glacer le sang, tout en confrontant ces derniers à Odawaa, et à un groupe de soldats français déserteurs. Si l'ensemble a le mérite d'être parfaitement traité graphiquement, il n'en va pas tout à fait de même au niveau du récit. Ce dernier manque de fil rouge, et il n'est pas toujours aisé pour le lecteur de savoir quel est le groupe de personnages qui est suivi, à un instant donné. Qu'à cela ne tienne, il suffira de deux ou trois relectures pour remettre les choses dans l'ordre, mais le défaut est tout de même problématique, et mérite d'être remonté.
La ballade du soldat Odawaa est un one-shot particulier, qui permet de retrouver des planches travaillées et recherchées. C'est un récit qui se mérite, par contre, et il ne faudra pas craindre les relectures pour véritablement en saisir toutes les arcanes. Une jolie petite réussite, en ce sens, même si on préférera nettement une série comme Notre Mère la Guerre, dans le même contexte historique !