Le numéro 62 de la revue Galaxies rend hommage à René Barjavel, écologiste précurseur qui a lancé ses cris d'alarme voilà déjà longtemps.
Au menu, on trouve d'abord quatre nouvelles non liées au dossier bimestriel.
Les Météorites, de Céline Maltère (2019)
Un homme qui vit dans la montagne avec sa famille, dans un été perpétuel idyllique, fait soudain face à l'hiver et à une étrange vieillarde qui lui enjoint de repeupler le monde avec elle...
Honnêtement, je ne suis pas sûre d'avoir réellement compris cette nouvelle qui ouvre la revue. Du coup, je n'ai pas grand chose à en dire.
Le Vainqueur, de Patrick Centerwall (2013)
(traduit du suédois par Jean-Pierre Laigle)
Dieu est mort. Désormais, il faudra adorer celui qui sortira Vainqueur de la guerre totale qui s'annonce.
Histoire d'une Apocalypse, plutôt chouette et originale dans son ton.
Le Chœur malade, de Richard Canal et Noé Gaillard (2019)
Alors que le Guide du Parti prononçait un discours, une fausse note a ébranlé le mantra de protection que le Chœur chantait autour de lui et il s'est effondré.
Très sympa par la façon dont la musique et le chant sont utilisés, même si on a déjà pu voir cette idée par ailleurs.
Les anges rêvent-iels de Lamashires ?, de Jeanne-A Debats (2019)
Cette bonne journée de 2088 a commencé par une action terroriste paralysant les transports, incitant iel narrateur à se rendre dans un café. Après tout, iel ne pouvait pas rentrer chez lui, puisque l'occupant de jour de son appart était déjà arrivé. Devant l'addition élevée, iel a choisi de payer en nature...
Cette nouvelle un peu longue nous plonge dans un futur proche grinçant, tant on y devine les excès du système d'aujourd'hui. Surpopulation, clivage par les richesses, manque de ressources, robotisation, tout s'y met pour brosser un avenir bien sombre. Au fil des pages, j'ai fini par adorer cette nouvelle qui fourmille d'idées et d'allusions (on s'en doute vu le titre évocateur, bien sûr !) pas forcément nouvelles mais très bien entremêlées. Coup de cœur également pour le Lamashire !
Dans le dossier René Barjavel et l'écologie, Jean-Pierre Andrevon (qui a aussi signé la couverture, dont je ne dirais rien, même sous la torture...) nous retrace le parcours de l'écrivain, son oeuvre, ses convictions. C'était un homme amoureux de la nature, convaincu que le progrès était néfaste et que "c'était mieux avant", que la bêtise de l'homme nous conduisait droit dans le mur à force de détruire nous-même notre Terre. Nombre de ses textes s'en ressentent.
Ce dossier est illustré par la nouvelle Colomb de la Lune, que René Barjavel écrivit en 1959, premier jet du roman homonyme publié en 1962. Un homme est envoyé sur la Lune, tout le monde attend son retour.
C'est un texte très court mais très personnel, qui sonne de manière assez poétique, et dans lequel l'auteur se livre. Et l'écologie n'y est pas oubliée !
Ensuite, nous trouvons encore d'autres nouvelles liées de près ou de loin au thème. Certains montrent notamment les conséquences néfastes de progrès technologiques ou d'une économie effrénée.
C'est pour demain, de Bruno Pochesci (2019)
En pleine Occupation, un collabo antisémite reçoit une curieuse lettre anonyme l'informant avec précision d'événements à venir.
Une nouvelle sympathique sur les voyages dans le temps, avec des clins d’œil à Barjavel, l'homme.
Flinguez-moi tout ça !, de Daniel Walther (1968)
Le sergent W. participe à la guerre contre les habitants de la planète Hécate. Les Hécatiens n'ont fait que répondre à la provocation, mais qu'importe : ils sont moches, et le le Parti National Évolutionniste qui mène la guerre représente la Civilisation...
Pour cette nouvelle à l'honneur de la rubrique Service des Affaires Classées, la revue rend hommage à Daniel Walther, un auteur marquant de sa génération mais plutôt oublié. Le texte est rageur et antimilitariste, à l'image de son auteur, mais aussi très touchant.
Vice pure, de Fabienne Leloup (2019)
Dans un coin de monde où il n'existe aucun autre moyen de subsister, tout le monde vend son sang au Centre de Transfusion International. Celui-ci est géré par l'église chrétienne : "Donnez, car ceci est son Sang". Pourtant, un prêtre s'interroge...
Une autorité religieuse corrompue qui contrôle et manipule les fidèles comme des moutons pour en tirer le maximum, plus intéressée par l'argent que par le salut des âmes... C'est glaçant de réalisme !
Le Festin des amnésiques, de Philippe Astier (2019)
Disponible en version intégrale exclusivement dans l'édition numérique.
Un riche héritier qui se prend pour un peintre éclairé. Des animaux aux talents artistiques. Une planète maudite. Une plante qui l'est tout autant...
Autant de textes entre SF et fantastique, qui sont autant de fragments d'une mosaïque curieuse. C'est assez divers mais plutôt sympa.
Le ciel au-dessus, de Dominique Douay (2019)
Le premier souvenir d'Aube, c'est sa naissance. Déjà adulte. Elle savait déjà s'exprimer, mais sa mémoire était vide. Des mots sont revenus, un par un, un mot en entraînant un autre. Puis quelques souvenirs liés à ces mots. Des souvenirs sans rapport avec sa (sur)vie actuelle dans une coursive grise et uniforme !
Un très beau texte, un peu étrange aussi, qui met en avant le pouvoir des mots.
Bob, de Marie-Olivia de Cabanaz (2019)
Disponible exclusivement dans l'édition numérique.
Eden vit dans un futur proche où les gens sont hyper connectés. D'ailleurs, elle ne s'exprime plus oralement, préférant communiquer intra-système. En manque d'argent, elle accepte de tester un programme de développement personnel. Celui-ci s'avère particulièrement intrusif et contraignant.
Cette nouvelle explore la dépendance aux assistants personnels (type smartphone pour nous mais directement dans le cerveau pour la protagoniste). Que faire face à une intelligence artificielle qui veut notre bonheur malgré nous ? Intéressant et une fois encore d'actualité.
Le quatrième appétit, de Robert Yessouroun (2019)
Disponible exclusivement dans l'édition numérique.
Une technologie de rajeunissement a été mise au point. Est-ce la fin de l'immortalité ?
Le sujet est proposé sous forme de brèves modernes (type extraits de blogs). De premières conséquences mineures (dépit des héritiers s'estimant lésés, béguins intergénérationnels) évoluent vite en bouleversements incroyables (conflits entre pro et anti...). Plutôt amusant et bien traité, avec un rythme très rapide dans l'enchaînement.
Suivent ensuite différents articles.
A l'occasion de la réédition du comics Marshal Law en intégrale chez Urban Comics (paru initialement en 1987), Franck Jammes nous propose son analyse de la série, qu'il juge "incontournable pour les amateurs de bons récits super-héroïques comportant une métalecture du genre".
Dans Crise des frontières et diabolisation de l’Autre, Kawthar Ayed étudie ce sujet dans la littérature utopique/dystopique à travers trois ouvrages en particulier. Je ne m'y suis personnellement guère intéressée, peut-être parce que je n'ai pas lus ces ouvrages de référence, ou parce que je ne suis pas vraiment adepte de ce genre d'analyse. Disponible exclusivement dans l'édition numérique.
Dans L'écran du souvenir, Jean-Pierre Fontana nous parle d'Homonculus d'Otto Ripert, une série de six films allemands datant de 1916/1917, mettant en scène un humain artificiel. Pas franchement passionnant pour qui n'en a jamais entendu parler...
Les films présentés sont plus modernes dans Six mois de cinéma F et SF, bien sûr ! Jean-Pierre Andrevon nous y présente en détail une grosse trentaine de sorties 2019, dont la plupart ne l'ont guère convaincu.