Les Chroniques de l'Imaginaire

Lorsque nous étions morts - Guibé, Mathieu

Lord Josiah Scarcewillow est vampire depuis un demi-siècle lorsqu’il réalise qu’il ferait mieux de quitter son train de vie mondain à Londres pour regagner son Gloucestershire natal. Le progrès scientifique le lasse et, en cette fin de XIXe siècle, les chasseurs de vampires s’organisent, ce qui rend hasardeux le fait de vivre en ville. 

Hélas, sa retraite est vite troublée par la découverte de braconniers sur ses terres et la rencontre avec une belle et étrange demoiselle, Lady Abigale. Alors que Josiah pensait son cœur mort depuis longtemps, celui-ci se consume pour la jeune femme, promise à un autre. Le chemin de l’union entre l’impitoyable vampire et la candide aristocrate va s’avérer long et semé d’embûches.

Mathieu Guibé nous offre une histoire d’amour tragique, sanglante et mortelle. Les thématiques du deuil et de l'amour destructeur sont au centre du récit. Son issue ne peut être que terrible car Josiah est une créature de la nuit, traqué de toutes parts et dont l’humanité ne subsiste qu’à travers l’amour qu’il porte à Abigale ou la cruauté dont il peut parfois faire preuve envers ses victimes. Cette humanité fluctue donc au cours du récit et en fonction de sa relation avec Abigale. Son indifférence envers certains de ses carnages est glaçante. Le remords ne fait pas partie de ses émotions. J’ai eu du mal à lire certaines scènes de violence. De même, Abigale va perdre de son innocence à son contact et faire de considérables sacrifices pour faire vivre leur histoire d’amour par-delà la mort. 

La narration, qui nous livre volontiers le point de vue de Lord Josiah, insiste sur sa souffrance et sur un deuil qu'il est incapable de faire. Toutefois, il est difficile pour le lecteur pourvu, lui, d’une once d’humanité, de lui pardonner l’autre souffrance, celle qu’il inflige autour de lui et dont ni lui ni sa dulcinée ne semblent avoir cure. 

Le suspense demeure présent tout au long du récit : on se demande si les tourtereaux trouveront finalement une manière d’être ensemble et ces derniers vont bien sûr de Charybde en Scylla. Le dénouement est bien amené et reste dans la tonalité du reste du récit, poignant et lugubre.

Lorsque nous étions morts est un récit fort en émotions et efficace, à conseiller aux amateurs de romance funeste et de vampires mais à éloigner des âmes sensibles.