Les Chroniques de l'Imaginaire

Bagdad, la grande évasion ! - Hossain, Saad Z.

Bagdad en 2004 n'est pas l'endroit idéal où traîner ses guêtres, mais Kinza et Dagr n'ont pas vraiment le choix, alors ils survivent comme ils le peuvent de petits trafics en tous genres. Leurs vies, déjà bouleversées par l'invasion américaine, le sont encore davantage lorsqu'ils se retrouvent mêlés bien malgré eux à une course-poursuite autour d'une étrange montre qui cache un secret millénaire. Mais quand vos meilleurs alliés, ce sont un ancien tortionnaire du régime Saddam Hussein et un soldat américain à moitié fou, et que vous avez contre vous un imam chiite fanatique, un alchimiste psychopathe, une vieille sorcière rancunière et un tueur en série indestructible, les choses n'ont vraiment rien d'aisé.

Ce premier roman de l'écrivain bangladais Saad Z. Hossain avance à un rythme effréné. Les deux héros, attachants malgré leurs défauts, sont perpétuellement ballottés de Charybde en Scylla. Ils n'ont que rarement le temps de reprendre leur souffle, et le plus souvent, ils mettent ce temps à profit pour échafauder des plans complètement insensés qui finissent tout de même par fonctionner. Il faut dire que leur monde est lui aussi complètement insensé : la guerre a mis la capitale de l'Irak sens dessus dessous, l'ordre ancien a disparu pour laisser place à un joyeux bazar. Enfin, il n'est joyeux que pour ceux qui ont l'argent ou la force, que ce soit les soldats américains en goguette ou les chefs impitoyables des gangs locaux. Les autres n'ont guère d'autre choix que souffrir.

Il m'a semblé que le livre souffrait d'un problème de ton à cet égard. La majeure partie du récit est clairement placée sous le signe de l'humour, avec des personnages loufoques, des dialogues cocasses et des situations absurdes, le tout enrobé dans une chasse au trésor digne d'Indiana Jones. Cela en fait un régal à lire, mais l'auteur administre régulièrement des piqûres de rappel sur la face sombre des choses, comme s'il craignait que le lecteur puisse oublier que la guerre est avant tout source d'atrocités, de drames et de douleur. À cet égard, le chapitre 24 est une véritable douche froide. Je n'en dirai pas plus pour ne rien dévoiler, mais mon plaisir de lecture a significativement décru après. Ce n'est pas que le livre était moins bon après, c'est juste que ce brutal rappel à la réalité m'a éjecté du délire et je n'ai jamais vraiment réussi à y rentrer à nouveau.

Mais je ne voudrais pas donner l'impression que Bagdad, la grande évasion ! est un mauvais livre. C'est un cocktail jubilatoire bourré de bonnes idées, même si le dosage de certains ingrédients ne m'a pas entièrement convaincu.