Fille d’un mercenaire à la retraite et d’une barde morte tragiquement, Tam Hashford ressent fortement l’appel de l’aventure. Malheureusement, son père est traumatisé par la perte de sa femme et interdit à Tam tout lien avec les monstres qu’il combattait autrefois. Il va même jusqu’à lui refuser d’apprendre à jouer d’un instrument ou de chanter. Tam étouffe sous ces interdits qu’elle contourne allégrement dès qu’elle le peut.
À l’époque où vit Tam, les monstres ne semblent en outre plus aussi redoutables que du temps de la jeunesse de son père. Ils n’arpentent plus librement les terres des hommes mais sont réduits en esclavage et vendus pour être utilisés lors de combats. D’ailleurs, les roquebandes, fameux groupes de mercenaires, ne défendent plus la population contre ces créatures mais partent en tournée, accompagnés de leurs nuées de fans, pour décimer monstres après monstres dans les arènes locales.
Tam croit rêver lorsque Fable, sa roquebande préférée, la recrute pour être leur barde. L’adolescente quitte son père pour rejoindre ses idoles, Nuage Libre le druine, le chaman Brune, la séduisante ensorceleuse Cura, mais aussi et surtout leur capitaine, Rose de Sang. Alors que la roquebande se dirige vers son dernier contrat, une nouvelle menace émerge : les monstres se rassembleraient pour un dernier assaut contre les humains. Tandis que l’ensemble des mercenaires se dirige vers le lieu des affrontements, Tam suit Rose et les siens vers une tout autre destination, afin d’honorer leur tout dernier contrat avec leur retraite.
Ce second tome de la série Wyld peut être lu sans avoir suivi le premier tome. L’entrée dans l’univers se fait en effet en douceur. On suit d’abord Tam dans son quotidien dans sa ville natale puis sa découverte du monde à partir de son admission dans la roquebande. Peu à peu, Tam découvre l’envers du décor. Elle se lie d’amitié avec les héros qui ne sont finalement que des personnes ordinaires, peut-être un peu plus traumatisées que la moyenne. Elle en apprend plus sur le fonctionnement des arènes mais aussi la nature de ceux que l’humanité considère comme des monstres. Tout n’est bien sûr pas aussi beau qu’elle le pensait au départ, surtout dans le contexte d’une guerre imminente. Cette narration du point de vue de Tam, très ingénue, permet donc au lecteur d’entrer graduellement dans le récit, même si cela se traduit parfois par une trop grande lenteur dans la première partie de l’ouvrage.
J’ai particulièrement apprécié le fait qu’on apprenne à connaître chaque membre de Fable, son histoire, ses motivations, son lien avec les autres membres du groupe. La dimension psychologique est omniprésente : on comprend presque aussi bien le raisonnement des antagonistes que des protagonistes. On a l’impression, en refermant le livre, d’avoir intégré Fable et son petit microcosme, ce qui n’est pas donné à tous les ouvrages.
Le concept des roquebandes, groupes de mercenaires adulés comme des stars du rock et faisant des tournées de combat en compagnie de leurs agents et groupies, est assez sympathique et donne une touche de légèreté à l’histoire. Celle-ci n’est d’ailleurs pas dénuée d’humour, parfois loufoque, malgré des thématiques sombres : le deuil, la guerre, l’esclavagisme, le viol… Ce qui semble au début être une aventure assez simple, portée par des héros flamboyants et délurés, se transforme ainsi peu à peu en une quête pour sa propre survie. La menace vient tout autant des défaillances personnelles des mercenaires que de la guerre, ce qui apporte un vrai plus au récit par rapport à d’autres ouvrages du même genre.
Les enjeux des combats s’accentuent au fil des pages mais les scènes d’action sont toujours aussi bien décrites du début à la fin. Du côté théâtral des arènes à la noirceur de la guerre, Nicholas Eames parvient presque à nous faire croire qu’on est aux côtés de son héroïne.
Mention spéciale à la couverture de Pierre Santamaria : elle représente les membres de Fable dans toute leur splendeur et, pour Nuage libre, leur exotisme.
Je m’attendais à un roman bourré d’action certes mais aussi de héros crâneurs, un peu à l’image des Ravens de James Barclay, et donc à une lecture plutôt rapide et sans prétention. Or Rose de sang est un livre qui surprend par son caractère poignant et par sa profondeur cachée. J’ai hâte de découvrir les autres romans de la série !