Les Chroniques de l'Imaginaire

Dépression (Givre - 6) - Vigne, Jean

Ange Bernier est prise au piège avec Jillian et Orda dans le complexe scientifique où est retenue Nizon. Heureusement, la policière vampire ne se laisse pas abattre si facilement, surtout depuis qu’elle a été transformée en créature de la nuit. Elle ne tarde pas à faire la connaissance des Kira Kage, de passage à Paris, et toujours décidées à se venger de Dame Fubuki, leur ancienne maîtresse qui les a trahies. Malheureusement pour elles, Dame Fubuki n’est pas en France mais arpente les souterrains du Vatican en compagnie de sa suivante Iwa, d’Erika, d’Auguste et du cardinal Richelieu. Ces êtres surnaturels ont en effet uni leurs forces pour obtenir un artefact mythique, à même de leur conférer de grands pouvoirs. Toutefois, un dernier obstacle de taille se dresse devant eux : l’artefact est gardé par un monstre tellement terrifiant que même Princesse Erika et Dame Fubuki le craignent.

Six mois avant cet affrontement, Erika initie sa quête à Venise et commence à intriguer.

Ce dernier tome de la série Givre se construit autour de quatre arcs narratifs qui se rejoignent peu à peu. L’un est situé dans le passé et nous dévoile l’envers du décor. Les premiers événements se situent en amont même du premier tome tandis que d’autres nous relatent les actions d’Erika au moment où Ange prend connaissance de l’existence des vampires. On voyage ainsi dans le temps et de ville en ville avec Erika et on comprend enfin l’ampleur de ses manigances. Si la présence de cet arc narratif m’a au départ surprise, elle m’a permis d’apprécier à sa juste mesure le personnage de Princesse Erika en lui conférant une once d’humanité. Elle n’est plus seulement la vampire sanguinaire et libidineuse entraperçue précédemment. Son enfance avant sa transformation vampirique avait bel et bien été décrite plus tôt dans la série mais c’est seulement dans ce tome-ci que la personne de la vampire acquiert toute sa profondeur. Ceci entre en outre en résonance avec les chapitres consacrés à Erika et ses compagnons dans le temps présent puisque ces derniers sont décrits comme plus vulnérables qu’auparavant.

Les deux autres arcs narratifs concernent d’une part Ange et ses amis et, d’autre part, les Kira Kage. Si les deux groupes se rejoignent vite, certains chapitres restent narrés par Ange ou Jillian tandis que d’autres livrent encore les impressions d’Ebiko et d’Aya. Encore une fois, on découvre des nouveaux aspects de ces personnages, en particulier d’Aya.

Ange, la protagoniste-clef de la série, est la seule narratrice à la première personne. On voit les événements se produire sous ses yeux, ce qui apporte une dynamique nouvelle au récit. J’ai d’ailleurs trouvé dommage que tous les chapitres narrés du point de vue d’Ange ne soient pas à la première personne : on alterne en effet entre la première et la troisième personne.

Ce dernier tome est bourré d’action. Dès les premières pages, on retrouve nos différents héros dans des situations périlleuses qui, bien qu’elles ne tardent pas à s’améliorer, sont vite remplacées par de nouveaux dangers. Même les épilogues portent en eux la promesse d’autres combats et d’autres aventures pour certains protagonistes. Le dénouement est toutefois satisfaisant en lui-même et on clôt bien la série avec le sentiment qu’elle est achevée.

Ce tome est celui qui me semble le plus abouti. J’avais apprécié de partir en visite touristique dans certains des tomes précédents mais l’intrigue de ces derniers était moins claire. L’auteur nous présentait des personnages secondaires, avec leur histoire, pour les rayer de l’histoire à coups de canines quelques pages plus loin. Rien de tel ici, le récit est bien plus maîtrisé. Jean Vigne rassemble tous les fils narratifs de ces tomes précédents et parvient à les lier de manière convaincante. Les personnages ont aussi acquis une nouvelle profondeur dans ce tome final. L’horreur se fait également plus subtile. Si le gore reste présent – et je suis contente que les invocations de Dame Fubuki n’existent pas –, les passages les plus glaçants ne sont pas forcément surnaturels.

Dépression est donc un tome incontournable si vous avez suivi la série jusque là car il capitalise sur les points forts des tomes précédents tout en laissant de côté certains de leurs écueils.