Les Chroniques de l'Imaginaire

Piscine Molitor - Bourhis, Hervé & Cailleaux, Christian

Nous sommes à Paris, en juin 1959. Boris Vian a maintenant trente-neuf ans, et il n'est pas au mieux de sa forme. Depuis toujours, il souffre d'une maladie chronique, qui affaiblit son cœur. Pour Ours, la femme qui partage sa vie, il est fréquent d'entendre les cognements du cœur de Boris dans sa cage thoracique. Boris Vian se rend à la Piscine Molitor, où il a ses habitudes, dit-il, pour faire travailler son cœur.

Et c'est bien plus tôt, en 1929, qu'on fait la connaissance de Boris, alors qu'il est âgé de neuf ans et que son père est sur le point de reprendre un travail ingrat, après avoir fait faillite. Une époque difficile, pour le jeune Boris, qui a du mal à comprendre que d'autres personnes vont s'établir là où il vivait avec sa famille...

Mais ce genre de désarroi forge aussi le caractère, et c'est dans le jazz que Boris Vian va trouver un certain réconfort, ainsi que dans un club auquel il appartient. Il y fait la rencontre d'amis qui seront fidèles, et aura bien du mal, par contre, à trouver l'âme sœur, la faute sans doute à une mère bien trop présente, qui n'hésite pas à faire l'étalage de toutes les maladies que la gent féminine peut transmettre...

Mais c'est bien dans la culture que Boris Vian va prendre son envol, notamment dans la poésie, et dans l'écriture de romans. Pour le moment, L'écume des jours, qui paraît chez Gallimard grâce à un certain Raymond Queneau, ne connaît pas encore le succès escompté. L'album est encore jugé un peu trop déjanté par la jeunesse de l'époque. Mais Boris Vian signe aussi des livres avec d'autres noms d'auteurs, notamment celui de Vernon Sullivan, qui sort un livre totalement décrié au moment de sa sortie : J'irai cracher sur vos tombes...

Les éditions Dupuis nous permettent de découvrir, ou redécouvrir, la vie de Boris Vian, à l'occasion du centenaire de sa naissance. C'est l'occasion d'en apprendre un peu plus sur un auteur qui aura laissé une oeuvre considérable derrière lui, en tant que romancier, mais aussi en tant que musicien (il était notamment fan de Duke Ellington), poète, ou encore chroniqueur ou scénariste.

C'est à Hervé Bourhis que l'on doit le scénario de ce Piscine Molitor, un titre au nom curieux, qui trouve une explication dans la vie de Boris Vian. Le scénariste de Hélas parvient à insuffler beaucoup de lisibilité dans ce one-shot, et ce malgré la présence de flashbacks qui rendent le récit vivant et intéressant. Les dessins et les couleurs de Christian Cailleaux sont de belles réussites, parvenant à s'adapter aux différentes situations et aux différents lieux qui auront traversé la vie de Boris Vian, de sa famille et de ses amis, à une époque où la Seconde Guerre Mondiale était bel et bien présente sur le territoire français.

Boris Vian aurait eu cent ans cette année : c'est une très bonne idée qu'ont eue les éditions Dupuis, de rééditer ce Piscine Molitor, initialement paru dans la collection Aire Libre en 2009.