Dans un coin de la campagne française, un groupe de paumés s'est installé dans une zone blanche, dans un domaine bien nommé : Liberty House. Pas d'internet, pas de téléphone, pas d'ordinateur. Pour la mère de Farah qui est électro-sensible, c'est enfin le paradis.
Lorsque ses parents arrivent dans cette communauté, Farah a six ans. Elle se plait tout de suite dans cette nouvelle vie, où enfin des adultes s'occupent et s'intéressent à elle et où sa laideur n'est pas l'objet de moqueries, comme à l'école. En grandissant, elle tombe amoureuse d'Arcady, le chef (le gourou) de cette étrange communauté qui regroupe surtout des bras cassés de la vie : personnes atteintes de différents syndromes, personnes âgées que tout le monde rejette, handicapés, anciens drogués.
Arcady est pour Farah comme un père et une mère réunis. Ses parents sont en effet trop occupés l'un par l'autre et laissent leur fille s'épanouir dans le groupe où tout le monde peut s'occuper d'elle.
Ainsi, c'est Arcady qui décidera de l'emmener voir une gynécologue lorsque, âgée de quinze ans, Farah s'inquiète de ne pas encore avoir eu ses règles. Le verdict est sans appel : syndrome de Rokitansly (ou aussi appelé MRKH), c'est-à-dire une absence complète d'utérus et un vagin d'à peine trois centimètres. Elle n'aura jamais ses règles, et ne pourra jamais avoir d'enfant. Quant aux rapports sexuels, il va falloir trouver d'autres solutions.
Farah n'informe pas ses parents, seul Arcady connait désormais son secret. Et il cédera à la demande de Farah qui, depuis deux ans déjà, lui a demandé d'être "son premier", celui qui la dépucellera.
Pour le quinquagénaire, ce n'est pas difficile : il couche avec toute personne qui en a envie, homme ou femme, peu importe. Mais pour Farah, il souhaitait attendre sa majorité sexuelle, même si la jeune fille était très insistante. Au vu et au su de tous les membres du groupe, les deux amants vivent alors leur histoire d'amour, sans que personne ne soit choqué. C'est normal, c'est Arcady, il est comme ça ! Et puis, dans la communauté, chacun couche avec qui il veut du moment que la personne est consentante.
Mais au fil des jours de ce si bel été, celui qui verra le rêve de Farah s'accomplir, la jeune fille se transforme physiquement petit à petit. De plus en plus laide (ne lui a-t-on pas dit qu'elle ressemblait à Sylvester Stallone ?) mais portant le prénom de celle qui avait été considérée comme la plus belle femme du monde, celle-ci n'est plus vraiment sûre d'être une fille.
Autour de Farah, certains vont se découvrir une passion, comme le père de Farah qui devient un spécialiste des fleurs. Et bien sûr chacun participe aux tâches ménagères. Ce n'est pas une secte, c'est un groupe communautaire, basé sur l'acceptation de l'autre.
Est-ce une secte ? Ou juste une communauté de personnes en souffrance et souhaitant vivre ou simplement survivre ?
La dernière partie du roman va nous donner un semblant de réponse. Farah part conquérir le monde extérieur, personne ne la retient. Mais elle garde des liens forts avec ceux de Liberty House.
Et dans une atmosphère beaucoup plus sombre, tout va se déliter.
C'est un roman très agréable à lire. Les personnages sont attachants, drôles ou émouvants ; l'écriture est belle, presque solaire. J'ai passé un très agréable moment avec Arcady, Farah, Dadah, Nello et tous les autres membres de Liberty House.
J'ai aimé l'ambivalence décrite : doit-on considérer cela comme une secte, comme ceux de l'extérieur le voyaient ? Quand on vit à l'intérieur du groupe, ce n'est pas si simple que cela.