Amy a été violée par une vingtaine de comancheros alors qu’elle n’avait que douze ans. Son amitié avec un jeune comanche de seize ans, Cerf Blanc, l’a un temps sauvée de la dépression et de la peur mais ce dernier a été appelé à défendre. Avant de partir et malgré le jeune âge d’Amy, ils prononcent des fiançailles comanches indissolubles.
Douze ans plus tard, Amy a vingt-quatre ans et ses fiançailles avec Cerf Blanc ne sont plus qu’un lointain souvenir. Elle est devenue institutrice, possède sa propre maison et est heureuse de mener une vie de femme indépendante, malgré le traumatisme du viol collectif qui entache toujours son rapport avec les hommes. Elle est stupéfaite de découvrir dans la presse que Cerf Blanc est devenu lui-même comanchero et qu’il aurait tué des centaines d’hommes. Elle est encore plus sidérée lorsqu'il la retrouve et entend bien lui imposer le respect de leur serment. Malheureusement, la famille d’Amy qui la protégeait jusque-là prend le parti de Cerf Blanc et elle est donc livrée à ce séduisant mais violent criminel.
Que dire ? La protagoniste, victime d’un crime odieux lors de son enfance, se voit forcée d’honorer un engagement prononcé lorsqu'elle était enfant. Rien que ça, ça craint. Ensuite, elle passe des dizaines et des dizaines de pages à répéter qu’elle ne veut pas du héros principal. Elle se cloître chez elle, pleure des nuits entières, a peur de prendre des bains au cas où il s’infiltrerait chez elle… Car oui, Cerf Blanc n’hésite pas à entrer par effraction dans sa maison, à proférer des menaces, à forcer des baisers.
Ce livre a été écrit dans les années 1990, à une époque où la notion de consentement était apparemment moins cruciale, et je pense qu’il aurait dû y rester. Cela pose en effet la question de la réédition d'ouvrages ne respectant plus les codes moraux en vigueur. Je ne peux pas le conseiller à de jeunes lecteurs ou de jeunes lectrices car il est pour moi crucial de discerner ce qui relève du romantisme, de la romance, de relations amoureuses équilibrées et respectueuses… du harcèlement, de la manipulation et de l’ascendant psychologique exercé ici non seulement par le protagoniste masculin mais par la famille de la protagoniste et, à mesure que Cerf Blanc gagne la confiance des habitants du village, par l’ensemble de ses proches. La protagoniste est prise au piège d’un prédateur sexuel. Ce n’est pas et cela ne devrait pas être considéré comme romantique.
Évidemment, Amy finit par céder mais est-ce par amour ou par pression sociale, par dépendance psychologique ? La dynamique va même s’inverser à un moment du récit, où ce sera elle qui voudra de Cerf Blanc et lui qui voudra partir. Évidemment (encore), elle désirait secrètement être avec lui mais ne le savait pas. Cela ne m’a pas détournée de ma sensation première car cela ressemble trop au « tu dis non mais tu sais que tu le veux vraiment » du type lourd dont on refuse les avances.
En points positifs, on peut dire que le style de l’auteur est simple, facile à lire. L’ouvrage détonne un peu dans le registre des romances historiques par sa violence, non seulement entre les protagonistes mais aussi à travers des scènes de viol et de fusillades. Cette singularité dans un genre aux codes d’écriture assez figés pourra plaire à certains. Je pense que cela peut aussi avoir un intérêt plus académique, en termes d'étude de l'évolution des histoires d'amour décrites par les romances et de l'impact de l'époque d'écriture sur les dynamiques relationnelles des amoureux.
La couverture, assez sobre, est sympathique, à mille lieues du kitsch de la couverture originale américaine.
Ce tome est le deuxième tome de la série Comanche. Il peut se lire sans avoir lu le premier, même si les protagonistes du premier tome et leurs enfants sont des personnages secondaires importants de ce tome-ci.
En résumé, je conseille ce livre aux personnes qui aiment quand les héroïnes sont « forcées » et à celles à la recherche d’une romance où le passé n’est justement pas romancé mais sombre et violent.