Les Chroniques de l'Imaginaire

Eugénie (L'Oiseau Rare - 1) - Simon, Cédric & Stalner, Éric & Stalner, Éric

A chacun sa manière de gagner sa vie, à Paris, en novembre 1898. Et celle d'Eugénie et de sa bande, tous issus de la zone qui entoure Paris, n'est pas la moins originale... Eugénie a un très joli timbre de voix, et elle n'hésite pas à s'en servir, dans les beaux quartiers, pour attirer un riche public. Alors que celui-ci est souvent tout ému par des chants très patriotes, c'est le moment pour la bande d'Eugénie d'entrer en action, en volant montres, bijoux et portefeuilles bien garnis. Et le comble, c'est que même les personnes qui font mine de poursuivre les voleurs sont eux-mêmes des complices...

Après les larcins, c'est souvent dans la zone que toute la bande se retrouve : en plus d'Eugénie, on a surtout Arthur et Tibor, qui ont tous deux travaillé dans un cirque, lequel est malheureusement parti en fumée... Eugénie pense qu'Arthur est son grand-père, mais il n'en est rien : lors de l'incendie du cirque, le vieil homme n'a pas pu sauver les parents d'Eugénie, et il est resté la seule famille de cette dernière, qui était bébé à l'époque...

Mais Arthur sait qu'il ne va pas bien. Son cœur va finir par lâcher. C'est d'ailleurs pour cette raison que Tibor va accepter des services illégaux, pour payer le laudanum qui sert à prolonger la vie de son vieil ami... Et à présent, c'est autour d'un trafic d'animaux de cirques que Tibor trempe... Un trafic dangereux, avec des langues qui pourraient vite se délier pour mettre en cause Tibor...

Qu'à cela ne tienne : pour l'heure, Eugénie est aux anges. Arthur vient de lui offrir deux places pour aller au théâtre, admirer son idole de toujours : la merveilleuse Sarah Bernhardt...

C'est à Cédric Simon et Eric Stalner que l'on doit ce premier tome de L'Oiseau Rare, une série qui paraît dans la collection Grand Angle de Bamboo. Les auteurs ont eu des recherches à faire, sur le Paris de 1898, et notamment sur la zone qui entourait la capitale, à l'époque. Il est aussi à noter que le récit a été imaginé par les deux auteurs sur la base d'une photographie de Eugène Atget, qui montre une petite fille chantant dans la rue, le visage souriant, lumineux, tourné vers les cieux. Une inconnue qui deviendra ici Eugénie, de manière fictive.

Les personnages rencontrés dans ce récit sont tous réussis et attachants. Si Eugénie est une fille qui ne manque pas de caractère, rappelant par certains côté la jeune Edith Piaf dans La Môme, elle est aussi entourée de Tibor et Arthur notamment, qui ajoutent une épaisseur au récit. On tient une petite histoire dans la grande, avec l'existence de cette zone autour de la capitale française.

Comme à son habitude, les dessins d'Eric Stalner, admirablement mis en couleurs par Florence Fantini, sont fins et minutieux : les planches ne laissent rien au hasard, et tout ici laisse transparaître les travaux de recherches, que ce soit au niveau des costumes d'époque, ou des décors. Ces derniers, d'ailleurs, sont variés, entre les beaux quartiers parisiens et la zone qui n'est autre qu'un immense bidonville.

Ce premier tome de L'Oiseau Rare est tout à fait prometteur, et il nous tarde de découvrir sa suite, pour ce qui sera un diptyque.