Mona a dix-sept ans et tout lui sourit. Elève brillante et artiste talentueuse, elle suit des cours de dessin et de peinture afin de pouvoir intégrer une prestigieuse école. Elle passe énormément de temps avec son meilleur ami Marin, alias Curry, qu’elle connaît depuis la maternelle, et ne pourrait pas rêver d’une vie meilleure.
Mais c’est l’amour qui la rattrape. Joshua travaille dans le musée où elle suit des cours une fois par semaine, et il ne tarde pas à la séduire : il est charmeur, intelligent, cultivé et il lui fait des déclarations d’amour enflammées. Mona tombe amoureuse de lui et pense désormais que sa vie est devenue parfaite. Elle ne voit pas que, rapidement, Joshua prend l’ascendant sur elle et qu’il va l’enfermer dans une relation malsaine et destructrice.
Les principaux protagonistes de ce roman prennent la parole tour à tour pour raconter ce qu’ils ont vécu. Mona, Marin, Lya, Cassien, Esther la sœur de Joshua, et même Joshua lui-même, au tout début de l’histoire, quand il n’a pas encore abattu ses cartes. On peut alors suivre le drame qui se noue, la façon insidieuse que Joshua a d’entraîner Mona toujours plus loin de ses amis et de sa famille, tout en tissant autour d’elle un filet serré à base de « tu es tout pour moi ma chérie, je mourrais si tu me quittais, et les autres ne comprennent pas combien je t’aime ».
De jalousie possessive en violence physique et verbale, la relation va se détériorer tandis que Mona se débat dans ce qu’elle croit être une merveilleuse histoire d’amour qu’elle seule serait en train de gâcher. C’est un roman dur. Mais un roman très bien écrit, où les autrices réussissent le tour de force de décrire très finement ce que peut être un pervers narcissique, et un homme capable de violence. Et surtout comment Joshua arrive à enfermer Mona, jeune femme lumineuse au début du roman, et à la transformer en une sorte de petite souris apeurée par son ombre. Il la dénigre et l’encense tour à tour, pour la faire culpabiliser et la garder encore plus sous sa coupe.
La violence du procédé n’est pas cachée, ni estompée, ni même éludée. Grâce aux différents points de vue des personnages, on apprend comment certains ont pu se reconstruire suite à un passé douloureux, comment Lya a vécu la même chose et tente d’aider Mona comme elle le peut, comment Cassien, le meilleur ami de Lya, a grandi suite à un massacre au Rwanda et comment la musique et l’écriture de poèmes et de chansons lui ont sauvé la vie et la raison.
C’est aussi un roman plein d’espoir. L’espoir qu’une fois sorti de l’enfer de la violence, on peut se reconstruire et aller de l’avant. Surtout quand on est entouré de gens qui vous aiment et qui sont bienveillants avec vous.
Quand on ressort de cette lecture, c’est à moitié assommé car le sujet est compliqué et traité avec un réalisme terrible, mais sans condescendance ni jugement envers les victimes. Un livre vraiment intelligent donc et que je conseillerais à de jeunes adultes et à des adultes. Pour qu’ils sachent que ce genre de choses peut arriver mais qu’on peut s’en sortir un jour.
Pour terminer, un autre point m’a beaucoup plu dans ce roman : l’évocation des tableaux qui ponctue le récit. Le choix des œuvres et de leur utilisation dans l’histoire est très bien amené et apporte vraiment un plus pour qui s’intéresse un peu à l’art. Certaines œuvres sont iconiques, d’autres un peu plus confidentielles, mais chacune est intéressante et le récit permet de jolies découvertes.