L'Atlantide vit des temps troublés. La reine Yerra, immortelle et prêtresse des dieux de l'Or et du Fer, gouverne l'île d'un joug impitoyable. Les sacrifices sanglants s'enchaînent, le peuple souffre. Et ce n'est pas le prêtre Ruslem, un vieux sage, qui y peut quoi que ce soit, car le culte des dieux de Lumière, les anciens dieux cléments, est en passe de s'éteindre. Tous brûlent de retrouver le mythique Glaive magique du héros légendaire Argall, annonciateur du retour d'un héros brave et sincère qui annoncera des temps meilleurs.
Voici qu'arrive un groupe de grands guerriers blonds. Conduits par un jeune chef charismatique, ils ont quitté les lointains territoires nordiques à la recherche de l'Atlantide. Leur voyage a duré longtemps, mais a fini par les mener à Atlantis.
Leur meneur, Argall, tombe sous le charme de la vierge Soroé, fille adoptive de Ruslem et héritière du sang des rois. Ceci n'est pas du goût de la reine Yerra, également amoureuse du jeune chef et extrêmement jalouse. S'engage une lutte tant pour le pouvoir que pour le cœur de l'étranger.
Fidèle à sa ligne éditoriale, Callidor nous propose une fois de plus de redécouvrir une œuvre d'imaginaire oubliée. Comme nous l'indique Thierry Fraysse dans son introduction, ce récit paru en 1904 sous le titre Les Atlantes est le premier roman de fantasy épique du XXe siècle. Anecdote amusante, c'est la parution en 2015 d'un traduction américaine qui a permis à l'éditeur de redécouvrir cet ouvrage de fantasy écrit par deux Français ! C'est ici la version révisée par Pierre-Barthélemy Gheusi en 1941 qui nous est proposée, avec également une fin alternative et un chapitre bonus retrouvés dans les archives.
Si ce récit peut paraître aujourd'hui un peu daté, il n'a pas pour autant mal vieilli. Il propose une aventure spectaculaire, où l'action est au premier plan mais où les intrigues politiques et la sorcellerie sont aussi de la partie. S'y affrontent une méchante reine sorcière conquérante et une douce jeune vierge martyre, toutes deux amoureuses du même héros. Orbitent autour d'elles une poignée de personnages, allant du prêtre sanguinaire mais couard au noble ambitieux prêt à toutes les alliances ou trahisons pour se rapprocher du trône. Les rebondissement s'enchaînent, attendus ou non, jusqu'à la conclusion, la fin inévitable de l'Atlantide. Il y a un côté théâtral à l'ensemble, avec des personnages typés qui ne varient guère de leur ligne de conduite, et des situations qui basculent en un clin d'œil.
La plume est de qualité, travaillée sans être lourde. Quelques termes surannés émaillent le récit, sans que cela ne dérange aucunement. Le tout donne une impression très poétique.
Il faut aussi souligner la qualité de l'ouvrage. Outre les splendides illustrations et noir et blanc de Valérian Rambaud qui agrémentent le récit, l'introduction est enrichie de diverses photographies des manuscrits originaux avec leurs corrections, tandis que la postface de Brian Stableford reprend pour sa part les illustrations originales de René Lelon. C'est ainsi un bel objet que l'on prend grand plaisir à feuilleter.
Pour qui aime les beaux livres et est curieux d'un récit précurseur dans son genre, voilà assurément une très belle découverte.