L'appât du gain n'est pas une chose nouvelle. On peut même y être confronté en pleine forêt équatoriale, en 1899. Deux hommes entrent dans une grotte, et tombent nez à nez sur un trésor inimaginable. Autour d'une momie à laquelle ils vont voler un magnifique collier en or, dorment tranquillement pas moins de sept cent tonnes d'or. De quoi déclencher la folie : les deux hommes se battent, et un seul survit. Un certain O'Reilly, un Irlandais, qui ne va pas tarder à succomber à ses blessures...
Ce n'est que trois ans plus tard que nous faisons la connaissance de Laureen O'Reilly, en Irlande. Laureen est une jeune femme de chambre de dix-sept ans, qui travaille chez un comte local, qui lui demande d'aller déniaiser son fils... Bien malgré elle, Laureen tombe enceinte, et elle est rejetée de tous dans cette Irlande ultra catholique et conservatrice. Elle parvient tout de même à retourner chez son oncle et sa tante, qui lui demandent de donner son enfant à un orphelinat. C'est à ce moment là qu'un banquier de Dublin lui remet une clé, qui ouvrira un coffre-fort. Un legs de son défunt père, en provenance de l'Equateur...
Alors, Laureen met la main sur le collier en or, ainsi que sur un parchemin rédigé en espagnol, qui parle de l'emplacement d'un fabuleux trésor en Equateur. Laureen a la bien mauvaise idée d'en parler immédiatement à un aventurier qui donne une conférence actuellement à Dublin. Un certain Sir Burton... Ce dernier donne tout de suite du crédit à la demande de Laureen O'Reilly, et lui garantit qu'il fera tout pour qu'elle puisse sortir sa fille de l'orphelinat, et l'élever plus que convenablement. Laureen le croit, mais bien à tort...
Ce premier tome de L'or du bout du monde, un diptyque qui paraît chez Grand Angle, a le mérite de nous faire largement voyager, entre une Irlande catholique du début du vingtième siècle, et les jungles luxuriantes qui renferment encore des trésors inestimables, datant des années 1500, une époque où Pizarro pille les trésors des Incas, l'Empereur Atahualpa en tête...
Le livre, scénarisé par Jérôme Félix (L'Héritage du Diable, Une vie à écrire, Jusqu'au dernier...), dégage une vraie authenticité dans la narration, liée aux conseils d'un véritable aventurier des temps modernes, qui est Philippe Esnos. Ce premier tome ne manquera pas de rendre hommage à un des derniers aventuriers des temps modernes, malheureusement disparu en 2020. On passe sans problème de l'Irlande à l'Equateur, notamment à Quito, sa capitale, et on appréciera aussi les explications de Sir Burton, sur les pillages des trésors incas par les espagnols, Pizarro en tête. De quoi rappeler Les Mystérieuses Cités d'Or, pour ceux qui sont de cette génération !
Les dessins de Xavier Delaporte sont un véritable régal. On alterne les plans larges et les plans serrés, on a des visages qui peuvent être d'une grande délicatesse (comme pour Laureen), mais aussi franchement taillés à la serpe : les expressions sont très réussies, et les mouvements sont eux aussi de la partie, notamment dans les scènes de lutte entre les personnages, dans une époque d'une rudesse folle.
Ce premier tome de L'or du bout du monde est une franche réussite qui nous fait voyager, et il me tarde d'en découvrir la conclusion !