Sur l'archipel du Vukland, la guerre civile fait rage entre les forces de l'ordre du président Pûrsson et ses opposants. Que ce soient les Kiviks, minorité autochtone, ou les Frères Pauvres, organisation mystérieuse où se mélangent Kiviks et Vulkos, leur but est de combattre les idées de ce président trop libéral. Les premiers veulent préserver leur terre ancestrale de Saarok d'un barrage qui détruirait leurs terres sacrées et les kafikadiks, pierres à la base de leur mythologie. Les seconds refusent que le pays soit vendu aux grandes entreprises chinoises et américaines qui sont alliées à la présidence. La situation se complique d'autant plus que les États-Unis et la Chine s'affrontent pour le contrôle des ressources du Vukland. Les Chinois soutenant les Kiviks, attirés par le pouvoir des pierres sacrées, et les Américains appuyant la répression car plus intéressés par les matières premières de l'archipel.
Bakran, l'âme damnée du président, poursuit toujours Run et Jo, qui sont liés par les kafikadiks auxquelles ils doivent la vie, pour se débarrasser d'eux car devenus trop gênants par ce qu'ils ont découvert sur ses agissements. Son groupuscule d'extrême droite, quant à lui, continue ses méfaits et par ses actions provoque beaucoup d'agitation justifiant l'emploi de la force par la police. De leur côté, Jo et Run tentent de retrouver Vork, un Kivik chassé avec sa famille de Saarok pour ne pas avoir respecté les traditions et tenté d'utiliser le pouvoir des kafikadiks. Luka, le frère de Run, était un de ses proches avant de se suicider dans de mystérieuses conditions. Run est persuadé qu'il est responsable de la mort de son frère et qu'il est lié à toute cette agitation car c'est lui qui est derrière les Frères des Pauvres.
La tension est extrême et chaque personnage lutte pour ses idées mais aussi et surtout pour sa survie car l'escalade de la violence ne laisse rien présager de bon.
Anthony Pastor, avec ces tomes 5 et 6, conclue cette saga qui se lit comme un véritable thriller mêlant intrigue policière, complot gouvernemental, influences des pays étrangers, politique et chamanisme. Ces deux derniers tomes sont denses, complexes et il faut s'accrocher pour pouvoir suivre les différentes histoires et leur kyrielle de personnages. Les destins se croisent et le fantastique prend de plus en plus d'importance avec le personnage de Vork, qui va devenir prépondérant dans la saga.
Cette conclusion est une explosion de violence, marquée par le trait plus agressif des dessins et les couleurs employées contribuent grandement à cette impression d'insécurité et de chaos. Les personnages deviennent jusqu'au-boutiste, poussés par les circonstances et la répression. C'est une lutte à la vie à la mort où personne n'est épargné. Le rythme est effréné dans ces derniers tomes, les personnages et les intrigues se croisent dans des situations qui paraissent inextricables, mais tout est lié dans cette histoire et chaque personnage et action a son importance.
J'ai été convaincu dans cette saga par l'environnement qu'a créé Anthony Pastor, cette histoire d'un peuple autochtone et opprimé qui se bat pour ses traditions, ses terres et ses croyances. Le contexte politique et économique, et les luttes d'influence qui en découlent, fait aussi résonance avec ce que l'on peut voir dans certains pays actuellement. Par contre, le côté fantastique des kafikadiks et du personnage de Vork m'a laissé un peu dubitatif. J'ai eu un peu de mal à me laisser convaincre par cet aspect de l'histoire et le dénouement n'a fait qu'accentuer cette impression.
Pour le reste, tout se tient parfaitement et les actualités dans le monde donnent malheureusement raison à l'auteur. C'est une bande dessinée efficace, haletante, que ces derniers tomes achèvent en beauté.