Les Chroniques de l'Imaginaire

Les Lys pourpres - Hann, Karin

Catherine de Medicis, épouse de Henri d'Orléans, devenu dauphin suite à la mort de son frère aîné, est certes jeune, mais elle n'en est pas moins cultivée, intelligente et de ce fait consciente de la fragilité de sa position à la Cour de France. En effet, malgré ses efforts, elle n'arrive pas à tomber enceinte, or il faut un héritier à la couronne. Heureusement, le roi François 1er apprécie son intelligence, cependant que sa maîtresse, la duchesse d'Etampes, considère la jeune femme comme quantité négligeable, ce qui la protège de cette redoutable intrigante. D'autre part, Catherine a sorti de son couvent la fille d'un vieil ami, afin d'en faire sa compagne et son alliée.

Pendant ce temps, Henri a pris pour maîtresse la "vieille" Diane de Poitiers, qui a vingt ans de plus que lui, mais dont il est follement amoureux. Celle-ci, soucieuse de sa réputation, et sensible à la raison d'état, encourage le dauphin à engendrer, par exemple en lui envoyant un médecin compétent. Et en effet, après avoir examiné intimement les époux, celui-ci est à même de leur suggérer une solution, qui produira d'ailleurs les effets escomptés, puisque Catherine tombera enfin enceinte. Et après la naissance d'un garçon, elle estime pouvoir enfin respirer.

Au fil des années, la santé du roi va aller en se dégradant, comme sa relation avec le dauphin. La haine entre les deux maîtresses va atteindre des sommets, et avoir des conséquences funestes, car la duchesse d'Etampes encourage les protestants, cependant que Diane de Poitiers est en lien (on ne parle pas encore de Ligue !) avec les Guise, catholiques. Même si les futures guerres de religion étaient sans doute inévitables, elles n'ont cessé de jeter de l'huile sur le feu. Après l'accession d'Henri au trône, Catherine, de plus en plus réduite à son rôle de procréatrice, enrage de sa mise à l'écart discrète au profit de la maîtresse royale. Tant que le roi sera en vie, elle n'y pourra malheureusement pas grand-chose.

Dans ce roman vif et bien écrit, l'autrice rend hommage à un personnage injustement oublié. En effet, si l'histoire raconte les années d'impuissance de la jeune Florentine à la cour de France, la fin la montre enfin puissante, d'abord comme reine mère visant à contrebalancer l'influence de Marie Stuart sur le faible François II, puis comme régente auprès du tout jeune futur Charles IX. D'autre part, on voit là les réflexions politiques de la jeune femme, comme la variété de ses lectures et de ses centres d'intérêt.

C'est plaisant à lire, l'histoire d'amour assez malheureuse de Catherine avec son beau et infidèle mari est contrebalancée, dans la meilleure tradition classique, par le duo des confidents des époux, et l'action, sentimentale ou politique, ne manque pas. Pour les curieux, un "post-scriptum" raconte la suite de l'histoire, dans ses grandes lignes, le corpus de notes est bien proportionné, ni trop imposant, exigeant de se reporter sans cesse en fin d'ouvrage, ni squelettique, et une bibliographie conséquente permettra éventuellement d'aller plus loin dans la connaissance des personnages ou de l'époque.

En somme, pour les amateurs et amatrices de roman historique qui auraient raté la sortie en grand format, c'est là une excellente occasion de visiter ou revisiter une période peu fréquentée de l'Histoire de France, et cette lecture facile et plaisante se glissera facilement dans un sac de voyage.