Les Chroniques de l'Imaginaire

Marivaux - Salaün, Franck

Pierre Carlet en 1688 dans une famille bourgeoise, Marivaux a passé les premières années de sa vie entre Paris et l'Auvergne. Destiné à suivre les traces de son père, il entre en faculté de droit. Mais ce qui l'anime, c'est l'écriture. C'est à cela qu'il veut se consacrer. C'est à Paris que tout se passera.

Contrairement à bien des hommes de son temps, Marivaux n'a pas de rêve de grandeur. Ce qu'il souhaite, c'est écrire : des romans, des réflexions, des pièces de théâtre. Les voir publiés pour les uns et jouées pour les autres. Humblement, sans chercher les mondanités. Il a l'amour des lettres pour principal bagage. Un écrivain sans noblesse qui ne souhaite briller par rien d'autre que son esprit, même s'il a le goût des beaux habits. Là semble être son seul péché de luxe.

Cette différence contribue à ce que Marivaux ait été marginalisé en son temps. Mais ce n'est pas là la seule raison. Tout d'abord, il y avait à cette époque une opposition entre les Anciens et les Modernes, autrement dit entre ceux qui prônaient que les auteurs de l'Antiquité ne pouvaient être surpassés et ceux qui pensaient qu'il ne fallait pas même chercher à les égaler, mais proposer autre chose. Marivaux, plutôt que de s'inscrire dans un camp ou un autre, se plaisait surtout à se moquer de cette querelle futile. On lui reprochait aussi son manque d'originalité, de toujours tourner autour du thème de l'amour et de s'intéresser aux réalités viles. Plus encore, d'écrire beaucoup de théâtre italien, qui était sous-estimé par rapport au théâtre français dont Voltaire était l'égérie. Ce dernier ne se privait d’ailleurs pas d'attaquer Marivaux dès que l'occasion lui était donnée. Pourtant, derrière une apparente nonchalance et des œuvres comiques, Marivaux écrivait avec sérieux et touchait à des thèmes de société avec pertinence et malice.

La consécration de tout homme de lettres était l'Académie Française. Marivaux a obtenu son siège, malheureusement l'accueil qui lui fut réservé n'avait rien de cordial. Contrairement à ce qu'on pense de l’œuvre de Marivaux aujourd'hui, on voyait d'un mauvais œil qu'il ait écrit des romans (genre méprisé) et on mésestimait ses pièces de théâtre.

La vie privée de Marivaux reste secrète, non pas qu'il donne l'impression d'avoir voulu la préserver, mais tout simplement qu'il n'y avait pas lieu de la mettre en avant. Espérons que malgré le décès prématuré de son épouse, il aura connu une vie amoureuse et amicale plus épanouie que sa carrière, car ses pairs n'auront pas été tendres avec lui. Il a heureusement connu une grande fidélité auprès des acteurs italiens aux côtés desquels il a travaillé de nombreuses années.

Le temps lui aura rendu justice puisque de nos jours, les pièces de théâtre de Marivaux font partie des plus jouées et chaque élève aura l'occasion de le rencontrer au moins une fois dans son parcours scolaire. Cette biographie de Franck Salaün nous permet d'apercevoir l'homme derrière l’œuvre, le rend touchant et nous donne encore plus envie de le lire et de démontrer qu'il a toujours eu toute sa place dans les lettres françaises.