Qui est-il, cet « ange de la mélancolie » que Nicolas Liau a choisi pour intituler ce nouveau recueil de nouvelles ? Quelles que soient les images qui vous viennent à l'esprit en lisant cette expression, ne vous y fiez pas et prêtez plutôt attention au sous-titre du livre : « contes atrabiliaires ». Ce n'est pas forcément l'adjectif que j'aurais personnellement choisi pour décrire ces quatorze textes, mais force est de constater qu'il est tout à fait approprié. Cela dit, une indication plus utile à porter sur la couverture aurait été : « pour public averti ».
En effet, ce sont des récits pour le moins dérangeants qui forment ce recueil. Après Quand je serai grand, je serai mort, je ne m'attendais certes pas à des histoires pleines d'entrain et de joie de vivre, mais L'ange de la mélancolie se situe encore un cran plus bas à tous points de vue, si ce n'est le style, toujours irréprochable. La plupart des nouvelles contiennent des descriptions aussi élégantes que peu ragoûtantes de situations singulièrement violentes ou dépravées et leurs protagonistes connaissent tous des fins au mieux tristes et au pire absolument horrifiantes.
Comme dans le précédent ouvrage de Nicolas Liau, certains textes échappent au gore le plus abject au profit d'un ton plus poétique, mais ils sont ici une franche minorité. Ailleurs, vous n'échapperez pas à son imagination aussi clinique qu'impitoyable. Au programme, meurtres, viols, sadomasochisme, inceste, pédophilie, maladies répugnantes, yeux arrachés, clous dans le crâne, bébés morts, rien ne vous sera épargné. Inutile de préciser qu'un titre de nouvelle comme L'arbre où j'ai pendu ta peau n'a absolument rien de métaphorique ! Ce sera à vous de décider si vous avez le cœur suffisamment bien accroché.
En ce qui me concerne, j'ai apprécié ma lecture, notamment parce que l'auteur manie toujours aussi bien la langue française, mais je crois que j'ai bien fait de ne pas ouvrir ce livre pendant une période de spleen. Parmi les vrais points faibles, je note la présence d'un nouveau récit-cadre, comme dans Quand je serai grand, je serai mort, qui m'a paru tout aussi inutile que dans ce livre-là. Je pense également que ces textes seraient peut-être plus percutants en isolation dans des anthologies d'auteurs variés ; dans un recueil, l'effet d'accumulation peut tendre à atténuer l'impact des dernières nouvelles. Mais ce n'est pas vraiment un reproche.