Pendant son séjour à Newport, le jeune Wilder, accompagné de ses compagnons de longue date, Richard Fid et Guinée, fait la connaissance de la jeune Gertrude de Lacey et de sa gouvernante Mrs Wylis. Les deux jeunes gens ne sont pas indifférents l'un à l'autre, et apprendre que les deux dames doivent embarquer prochainement sur un vaisseau marchand n'a rien pour le rassurer, car il sait que le fameux Corsaire Rouge rôde dans les parages.
Il rencontre aussi un homme fascinant, dont il partage l'amour de la mer et les compétences de navigateur et de meneur d'hommes. Celui-ci lui propose de devenir son lieutenant, et Wilder n'hésite guère à accepter. C'est en définitive Wilder qui sera aux commandes de la Royale Caroline quand les deux femmes y embarqueront, mais il ne pourra éviter la suite de désastres dont tous seront victimes.
Ce roman maritime compile toutes les grandes scènes d'action du genre, puisqu'on y trouve mutinerie, naufrage, combat naval et tempêtes. On pourrait donc penser que c'est un roman au rythme vif, malgré sa longueur. Malheureusement, on aurait tort : c'est un roman écrit au XIXe siècle, dont la traduction date du même moment, et il permet surtout de mesurer combien la fiction romanesque a changé depuis. La façon dont les personnages semblent s'immobiliser en pleine action pour étudier leurs sentiments, personnels ou respectifs, est certes familière aux lecteurs des oeuvres du temps, mais elle n'en tend pas moins à diminuer la crédibilité des personnages et de l'action.
Si on néglige cet aspect, ce roman écrit par quelqu'un qui a été marin et sait de quoi il parle est intéressant, d'autant qu'il se déroule au moment où la domination anglaise sur les colonies d'Amérique du Nord commence à paraître insupportable à ces dernières. Ainsi, le Corsaire Rouge peut être vu comme un patriote autant que comme un pirate, et préfigure par bien des aspects le capitaine Nemo de Jules Verne. Les personnages secondaires sont bien caractérisés et apportent souvent une touche d'humour bienvenue, notamment Fid ou l'aubergiste Joram.
Le roman est préfacé par Philippe Jaworski, et accompagné d'un appareil critique très complet, puisqu'il comporte, outre des notes regroupées en fin d'ouvrage, une biographie sommaire de l'écrivain, une notice sur l'écriture du roman et des indications bibliographiques pour qui voudrait aller plus loin dans sa découverte ou redécouverte de l'auteur. En somme, pour qui apprécie ce style d'écriture, et qui voudrait découvrir au moins une autre oeuvre de l'auteur du Dernier des Mohicans, cette histoire maritime est sans doute une bonne indication.