Nous sommes en 1941. Monique débarque à Paris, dans une capitale occupée par les Allemands. Elle y arrive avec sa sœur, Jacqueline, qui a déjà dégoté un rendez-vous avec un certain Max Schaar, un officier allemand... Alors, Monique découvre Paris et ses plaisirs nocturnes. Les sorties sont fréquentes, et il y a toujours des gens à rencontrer, des tableaux à admirer, des concerts à écouter... Et puis, Monique fait la rencontre de Francis, un gentil garçon un peu plus âgé qu'elle, qui est cultivé, drôle, avenant, mais dont la jeune fille ne veut pas encore tomber amoureuse.
Mais bientôt, la jeune femme rend Francis fou de désir, à force de le faire patienter pour profiter encore de sa liberté de célibataire. Un soir, le couple n'y tient plus, et Monique apprendra bientôt qu'elle est enceinte. Une petite fille va arriver, qui se prénommera Nicole. Les sorties se font plus rares, et la présence allemande de plus en plus rapprochée... Parmi les amis de Monique, il y a ce jeune pianiste de talent, noir, juif et homosexuel... Des signes qui le mettent en grand danger...
Et puis, la libération arrive, quelques années après. Les soldats américains gagnent la capitale. C'est le moment des rencontres entre ces soldats libérateurs et les jolies jeunes filles françaises. Monique n'échappera pas à la règle, alors que sa sœur va subir le joug des siens, pour avoir couché avec l'ennemi... Monique a du accepter d'abandonner Nicole à son père, Francis. Maintenant, il est temps de penser à la reconstruction...
C'est à un album intimiste et très humain que nous convie Stephen Desberg. Le célèbre scénariste met de côté des séries comme IR$ ou Le Scorpion, pour raconter une histoire dans ce one-shot, qui est en partie tirée de sa propre histoire familiale. Une histoire d'abandon maternel, et de retrouvailles vaines ou bien réelles par la suite. Une histoire familiale, certes, mais qui se produit aussi lors d'événements appartenant bel et bien à la grande Histoire, avec un grand "H".
Si l'histoire est émouvante, elle est aussi assez complexe à suivre. Les flashbacks sont de la partie, et il n'est pas toujours aisé de savoir, au premier coup d'œil, où, et surtout quand, on se situe. Pour autant, les dessins d'Emilio van der Zuiden sont ici de toute beauté, que ce soit au niveau des décors, des costumes, et des personnages, surtout féminins, qui sont magnifiquement représentés. Monique et sa sœur sont toutes deux très jolies, avec ce charme rétro des années 40 et 50.
Aimer pour deux est un one-shot sensible et intelligent, auquel il manquerait juste par endroit une petite voix off qui nous remettrait sur la voie, ou un traitement graphique différent, selon qu'on se situe dans le fil principal de l'histoire ou dans un flashback. Ceci étant dit, la lisibilité est tout de même bien présente, et on parvient vite à reconstruire le fil rouge. Une petite histoire dans la grande Histoire, comme on les aime.