L'Empire teixcalaanli sort tout juste d'une grave crise politique qui a vu Dix-Neuf Herminette devenir Impératrice, suite à une tentative d'usurpation du trône. Celle-ci souhaite poursuivre la politique de paix de son prédécesseur Six Direction. Hélas, les vaisseaux continuent de disparaître aux frontières de l'univers connu, c'est pourquoi la nouvelle Impératrice a nommé une nouvelle yaotlek - commandant militaire - avec pour mission d'éliminer la menace. La tâche s'annonce bien difficile pour la yaotlek Neuf Hibiscus, dont le commandement est miné par l'insubordination de la moitié des six petites légions qui lui ont été confiées.
Les aliens apparaissent de nulle part et détruisent impitoyablement leurs ennemis, y compris les civils. Incapable de communiquer avec eux, la yaotlek demande l'aide du ministère de l'Information. Trois Posidonie, qui s'ennuie depuis que l'ambassadrice Mahit Dzmare est retournée sur la station de Lsel et qui est curieuse de ce premier contact, saute sur l'occasion. Elle en profite pour emmener Mahit, qui est une barbare mais également une linguiste : elle ne sera pas de trop pour l'aider à comprendre les bruits proprement vomitifs produits par les aliens...
Quel plaisir de se plonger dans la suite d'Un souvenir nommé Empire ! On y retrouve les personnages déjà rencontrés, notamment Mahit et Trois Posidonie, mais également de nouveaux personnages de la station Lsel ou de la Flotte teixcalaanlie.
J'ai ainsi beaucoup apprécié de découvrir Neuf Hibiscus, yaotlek fraichement nommée confrontée à la méfiance et l'hostilité de ses légions, et son second Vingt Cigale, aux principes de vie inhabituels dans l'Empire. Leur relation de longue date en fait un duo éminemment attachant, les deux se complétant tout à fait.
J'ai été moins intéressée par les ennuis de Mahit avec les autorités de la station Lsel, qui ne l'apprécient guère et auxquelles elle essaie assez désespérément de cacher la présence illicite dans son crâne de deux machines-imago d'Yskandr Aghevar. Ses disputes avec Trois Posidonie ont également un goût de réchauffé et ne convainquent pas vraiment.
Par contre, j'ai trouvé très sympathique les interventions du jeune Huit Antidote. L'héritier du trône n'a que onze ans, mais il est courageux et déterminé, et décidé à bien faire. On le sent chercher l'approbation des adultes, comme quand il est si fier qu'on l'appelle par son nom d'usage Remède ou qu'on le surnomme "petit espion", tout en essayant de rester fidèle à ses convictions. Il découvre qu'il est difficile de savoir à qui faire réellement confiance, et que la loyauté des gens ne va pas forcément à l'Empire d'une manière générale. Un apprentissage délicat pour un futur Empereur qui en est encore à l'âge où on lui ébouriffe les cheveux !
Le fond du roman est intéressant mais peut-être pas assez creusé à mon sens. Le langage est encore au coeur de cet opus, puisque l'Empire peine à communiquer avec les aliens, mais aussi la notion de personne, traditionnellement très limitative dans l'Empire mais qui peut s'étendre aux barbares stationnistes... ou encore à des intelligences totalement autres. Il me semble pourtant que l'autrice aurait pu pousser le sujet plus loin, complexifier la situation et les réflexions. De même, le dépaysement n'est pas aussi réussi que dans le premier tome.
Cela étant, j'ai quand même dévoré le roman à toute vitesse. Le style est fluide, le rythme rapide et c'est très agréable à lire. Si j'ai préféré le tome 1, j'ai quand même passé un très chouette moment avec celui-ci !