Les Chroniques de l'Imaginaire

Pierre-de-vie - Walton, Jo

Taveth vit dans le petit village d’Applekirk. Elle a trouvé sa pierre-de-vie, sa voie, en s’occupant du manoir de Ferrand, le seigneur du village. Mariée à Ranal, le régisseur, Taveth est aussi l’amante de Ferrand ; tandis que Ranal est l’amant de Chayra, la femme de Ferrand. Chayra quant à elle ne s’arrête pas à un époux et un amant mais multiplie les conquêtes dans le village. Le manoir, empli des enfants des uns et des autres, est un havre de paix pour cette famille. Les jours s’écoulent au temps des moissons, du passage des prêtres itinérants et des fêtes. Mais voilà qu’arrivent des visiteurs qui bouleversent cet équilibre. 

Hanethe, aïeule de Ferrand, revient des terres orientales, où le temps s’écoule plus lentement, où la magie est plus vive et où les dieux résident. Ayant provoqué la colère de la déesse Agdisdis, Hanethe est poursuivie par ses sbires, notamment par une prêtresse tout récemment arrivée au village. 

Jankin est à l’inverse originaire des terres occidentales, où la curiosité même semble étrange tant les pensées sont ralenties, où la magie est une rumeur, presque un mythe. L’universitaire, venu à Applekirk pour étudier une ancienne civilisation et échapper à une paternité non désirée, est un coureur de jupons invétéré. Si le retour d’Hanethe va réinterroger la question de la filiation dans la famille d’Applekirk, celle de Jankin va mettre à rude épreuve leurs relations amoureuses.

Bien que prenant place dans un univers fantastique, ce roman apparaît davantage centré sur les « tranches de vie » des occupants du manoir et du village. Leurs amours, et en particulier le fonctionnement polyamoureux de ces habitants, est au cœur de l’intrigue. Le reste apparaît plus accessoire, presque comme des prétextes pour perturber cet équilibre. À l’exception de quelques éléments surnaturels, le roman aurait pu prendre place dans le monde réel.

Les pierres-de-vie des protagonistes ne sont pas dénuées d’intérêt, notamment celle de Taveth qui lui permet de voir les versions passées ou futures des habitants du manoir. Cependant, j’ai peiné à m’intéresser à l’intrigue. Je me suis longuement interrogée sur la raison de ce manque d’intérêt pour un ouvrage qui comportait pourtant de nombreux éléments attisant ordinairement ma curiosité : une demeure ancestrale, un univers rappelant les contes de fées, des relations entre personnages travaillées, une menace énigmatique, des scènes de la vie domestique…mais aussi des combats.

Je crois qu’au final, c’est l’emphase sur les amours des personnages qui a péché pour moi. Ce n’est pas tant une histoire de romance que de jalousie assez puérile, qui bien qu’elle soit expliquée rationnellement dans l’intrigue, m’a laissé un arrière-goût de sitcom adolescente – et donc d’exaspération. Les personnages, qui ont l’air à première vue bien campés, dévoilent progressivement une nature plus stéréotypée : la femme belle mais frivole car peu sûre d’elle, la grand-mère revêche au grand cœur, etc. L’univers fantastique est intriguant mais reste très peu développé.

Pierre-de-vie est un roman qui plaira aux amateurs de tranches de vie, à ceux qui aiment les complications amoureuses et les univers de fantasy laissés en arrière-plan.