Les Chroniques de l'Imaginaire

Le secret des Rothschild - Rothschild, Elie Jr (de)

Ils sont opportunistes, radins (eux se disent « économes »), se marient entre eux (l’argent doit être sous contrôle, les filles n’héritent jamais de rien, et gare à ceux qui se marient en dehors de la famille, ils sont aussitôt banni de la tribu), profitent de la moindre faille des systèmes pour se faire le plus d’argent possible, se pensent altruistes en donnant un peu de riz aux Irlandais lors de la grande famine, mais se font rembourser leur abonnement à l’opéra lors d’une épidémie et ils sont rancuniers. Voilà le portrait, en quelques mots, de la famille Rothschild vers 1840 délivré par Elie, un des enfants illégitimes de la famille.

Balzac disait de la famille : toute fortune commence par un crime oublié. L’écrivain a été leur obligé, car ils aiment le monde des arts et se targuent d’être de grands mécènes, mais cela ne l’empêchait pas de les critiquer dès qu’il en avait l’occasion.

Plus tard, ils créeront la Société Générale, investiront dans les chemins de fers, certains vont mener des vies de bâton de chaise, aider la communauté, espionner des états, ouvriront le théâtre Pigalle, tenter de garder à flots des états qui se servent d’eux, bref, ils continueront leur chemin comme ils le font depuis 1744, en s’aidant de quelques principes basiques de la finance et d’une bonne dose d’opportunisme, provoqué ou pas.

Pour être franche, ce livre ne m’a pas du tout plu et ce pour plusieurs raisons. La première est que je déteste quand un « auteur » prend le lecteur de haut, ce que fait Elie de Rothschild Jr dès la page 38. En effet, l’auteur fait preuve d’une condescendance marqué de mépris envers ceux qui dépensent leur argent au lieu de le mettre de côté. C’est le syndrome typique de celui qui n’a jamais eu de problème d’argent que de juger comment les autres dépensent le leur. Après avoir expliqué qu’il fallait réinvestir les 8/10ème des gains, l’auteur écrit : « Et si la formule est d’une simplicité enfantine, bizarrement, bien peu, même encore aujourd’hui, l’appliquent avec rigueur, lui préférant le plaisir furtif de faire les boutiques en dilapidant leur futur, oh pardon, leur argent ».

Et tout au long du livre, il va nous délivrer ce genre de sentence, en italique, pour bien souligner que c’est lui qui parle, et pas l’écrivain, et à chaque fois j’ai eu la même impression de mépris envers ceux qui n’ont pas fait comme sa famille. Il en profite aussi pour nous donner des « secrets », qui sont souvent du simple bon sens, ou des choses enseignées dans n’importe quelle école de commerce, celle-ci même dans les bas de gamme.

L’histoire en elle-même pourrait être intéressante si, au bout du premier tiers, l’auteur ne passait pas son temps à avancer de plusieurs années avant de revenir en arrière, puis repartir sur une autre date, pour revenir sur ce qu’il avait dit, bref… Je ne demande pas toujours une progression linéaire dans une biographie, mais celle-ci se révèle particulièrement foutraque à partir des années 1900, et quand le « name dropping » commence, j’avoue que j’ai lâché l’affaire (Disraeli, Van Cleef, la Reine Victoria, les empereurs…).

Pour terminer, si la syntaxe se révèle parfois approximative, c’est surtout la concordance des temps qui m’a donné mal à la tête tellement l’ensemble manque de cohérence.

Fils de la main gauche, ayant eu la chance de pouvoir essayer plein de « métiers » différents (qui, de loin, s’apparentent beaucoup plus à des caprices passagers qu’à de véritables vocations : acteur, architecte, photographe, meneur de revue…), l’auteur nous livre ici sa vision de l’histoire de sa famille.

Personnellement, je n’y ai pas trouvé grand intérêt, à part celui de découvrir l’origine de la famille, et si l’auteur se dit « réfractaire » à cette famille, au vu de son CV, je ne suis pas sûre qu'il ait tout rejeté d'elle.

Quant aux « secrets » promis… Vraiment, ça, des secrets ?