Le royaume des Lacs entame une lutte désespérée contre son ennemi, le royaume de Malebrume et ses alliés des Cimes. Derrière cette guerre, le terrible sorcier Mnéfeth se réjouit de la vulnérabilité du royaume des Lacs, de sa Reine Myriel et de son ordre de chevaliers. En effet, les missives envoyées par la Reine Myriel à sa consœur des Mille-Forêts, ancienne alliée des Lacs, restent sans réponse. La jeune sorcière Tyar est au loin, dans les Terres Ocres, auprès de son arrière-grand-père, le grand sorcier Moutouoro. Pourtant, le royaume des Lacs va avoir besoin de rassembler tous ses amis et alliés pour survivre aux manigances de Mnéfeth et à son engeance de bêtes maléfiques.
En désespoir de cause, l’Ordre du Cygne est envoyé dans le royaume des Mille-Forêts pour une mission diplomatique de la plus haute importance. Pour les écuyers, il s’agit de leur première mission menée avec leur Primelame, leur première épée aux emblèmes de l’Ordre, prélude à leur prochain adoubement. L’occasion pour Alix de prouver une bonne fois pour toute à Oswald, son chevalier et chef de l’Ordre, qu’elle est à la hauteur. Cependant, les ennemis guettent les frontières des Mille-Forêts et l’Ordre du Cygne comme tout le Royaume vont basculer plus vite que prévu dans le chaos.
Les Âmes fraternelles est le troisième et dernier tome de la série L’Ordre du Cygne. Autant le dire tout de suite, c’est un volet final riche en actions et en émotions. On pourrait croire que ce dernier tome se bornerait à conclure les arcs narratifs déjà initiés lors des tomes précédents. Il le fait mais va plus loin. On en découvre enfin un peu plus sur l’énigmatique royaume des Mille-Forêts, auquel il avait seulement été fait allusion dans le tome précédent. Son enchanteresse et l’objet de son désaccord avec Walgrïn constituent l’un des mystères du récit, qu’on a hâte de voir dévoilé. J’ai particulièrement apprécié le dilemme que présentaient ce royaume et cette enchanteresse pour l’Ordre du Cygne : entre l’exposition à des périls de nouvelle nature, à un moment où leur temps est compté, et la nécessité de ne pas froisser les puissants des Mille-Forêts pour espérer remporter la guerre.
Nos héros se retrouvent très vite en fâcheuse posture, à plus d’un titre. Je n’ose trop en dire sur le contenu de leurs aventures pour ne pas gâcher le plaisir de la découverte. Disons seulement qu’ils vont de Charybde en Scylla, qu’on se demande parfois comment ils vont bien pouvoir s’en sortir mais que la solution apportée par l'auteure est toujours logique et cohérente avec son univers. Je ne peux résister à l’idée de vous donner un seul exemple, volontairement imprécis : une capacité spéciale des chevaliers, plus ou moins développée chez les uns et chez les autres, qui va permettre de les sortir d’une mauvaise passe à un instant crucial. Récolter ce qui a été semé parfois dès le premier tome, c’est là le signe d’une intrigue bien pensée. Surtout, c’est toujours un plaisir pour le lecteur de n’avoir pas simplement avoir affaire à des deus ex machina, en particulier dans les ouvrages jeunesse où la tentation de tout résoudre d’un coup de baguette magique est peut-être plus forte.
Toutefois, les amateurs de magie auront tout de même leur content de sortilèges. L’affrontement de Malebrume et des Lacs est en effet l’occasion pour tous les sorciers de mettre leur talent à profit et de déployer des trésors d’ingéniosité pour l’emporter.
La narration alterne entre les différentes forces en présence : Mnéfeth pour Malebrume, l’Ordre du Cygne, la Reine Myriel ou encore l’enchanteur Walgrïn mais aussi Tyar ou encore des représentants des royaumes des Cimes et des Mille-forêts. Ceci contribue au dynamisme de l’ouvrage et permet d’alterner les moments plus ou moins intenses. Si le livre laisse, de manière générale, moins de place au développement psychologique des personnes que les tomes précédents, il contient une romance pleine de suspense.
Pour les lecteurs ayant besoin de se rafraîchir la mémoire, la liste des nombreux personnages est présente en début d’ouvrage, de même que les neuf commandements de l’Ordre du Cygne et le serment de l’écuyer. Un avertissement rappelle aussi que des thématiques assez violentes peuvent être évoquées : le viol, la violence, le deuil. Que les âmes sensibles se rassurent néanmoins, à moins d’être particulièrement jeunes : ces thématiques sont bien présentes dans le récit mais l’auteure ne se complaît pas dans leur description, succincte, allant droit au but sans avalanche d’hémoglobine. De même, la romance est traitée de manière assez pudique. C’est bien un ouvrage que l’on peut lire à partir de douze ou treize ans.
Sur une autre note, il convient de mettre en lumière encore une fois la couverture réalisée par Patrick Connan, visuelle et attrayante.
Pour résumer, Les Âmes fraternelles est une lecture satisfaisante à plus d’un titre : d’abord, en tant qu’ouvrage à part entière, pour la richesse de son intrigue, ses personnages sympathiques ou maléfiques, ses scènes d’action percutante, ensuite parce qu’il clôt les arcs narratifs bâtis au cours des tomes précédents, y compris ceux des personnages secondaires. Avec ce livre, Virginie Salobir offre une superbe conclusion à sa série.