Elle est ivre au milieu de ses convives, elle se sent mal et veut que tout le monde s'en aille. Son accouchement, le bébé qui pleure tout le temps et son mari Lars qui est souvent absent font qu'elle n'en peut plus. Lars qui devait être là pour le dîner, pour recevoir ses amis et faire son numéro habituel. Le téléphone sonne, elle ne reconnaît pas la voix, normal c'est la police. Lars a été criblé de balles dans sa voiture, exécuté. Au même moment, un homme voit les informations à la télévision et le reportage sur l'assassinat de Lars, il le connaissait. Plus tard, après l'enterrement, il va la voir, lui explique qui il est et ce que faisait son mari. Elle semble tomber des nues en comprenant qu'il avait le quasi-monopole de la prostitution à Copenhague. Jamais elle ne s'est posée de questions sur la source inépuisable de ses revenus, jamais elle n'a cherché à savoir, elle en a profité à fond, sans vergogne. Et cet inconnu qui lui dit de ne rien lâcher, de prendre la place de son mari sans chercher à se venger sinon elle n'aura plus rien pour elle et son bébé. Elle est perdue, que doit-elle faire, tout vendre ou prendre la suite de Lars et faire confiance à cet homme qui semble si bien connaître son mari ?
Jérémie Guez nous livre un roman noir, très noir. L'histoire est glauque, les personnages sans scrupule, la femme semble fragile et paraît touchante au premier abord. On a presque de la compassion pour son aveuglement, mais elle est bien plus coriace qu'on ne le pense. L'homme est un vrai dur, avec un certain code moral, un guerrier qui tient ses promesses et qui va jusqu'au bout lorsqu'il donne sa parole. Il attire un peu la sympathie pour ce code d'honneur qu'il s'efforce de respecter. Tous deux naviguent dans un monde cruel de gangsters sans pitié où les carrières sont généralement courtes et se terminent souvent dans le sang.
Le texte est incisif, nerveux, percutant comme un combat de boxe. On sort de cette lecture comme soûlé de coups, pas de paragraphes, juste des phrases qui se suivent, des dialogues courts sans fioritures. Le fait que les personnages principaux ne sont jamais nommés participe à ce sentiment.
Peu d'émotions dans ce court roman, le style sec permet de rendre la violence et le contexte âpre de l'histoire. C'est efficace et nous fait tourner les pages rapidement, on arrive au bout du roman presque sans s'en rendre compte. Jérémie Guez nous entraîne dans la noirceur des bas-fonds de la pègre où les sentiments n'ont aucune place, où l'on rencontre les personnages les plus vils.
C'est un roman noir, au style marqué, qui ne laisse pas indifférent mais qui peut laisser certains lecteurs de côté.