Auden vient de finir le lycée et révise déjà assidûment pour être la meilleure possible dans la fac d’éco qu’elle compte intégrer à la rentrée. Cela lui fournit aussi une occupation car elle a du temps libre à revendre. Poussée par ses parents à se surpasser scolairement, elle n’a jamais eu d’amis proches, n’a jamais partagé les expériences des enfants de son âge comme d’apprendre à faire du vélo, faire du bowling ou aller à une soirée. Ses journées sont donc rythmées par ses études. Et ses nuits aussi, car la jeune fille est insomniaque depuis trois ans, c’est-à-dire depuis le moment où le mariage de ses parents a commencé à se déliter. Elle vit à présent seule avec sa mère, prof d’université en littérature reconnue et femme très exigeante. Son père, écrivain en panne d’inspiration depuis des années, s’est remarié avec Heidi, une femme à l’opposé de la mère d’Auden, pleine d’optimisme et sentimentale. Hollis, le frère d’Auden, a lui toujours eu un traitement privilégié de la part de ses parents. Autorisé à faire les quatre-cents coups, il a profité du divorce pour partir en voyage autour du monde et ne communique de temps en temps que pour demander de l’argent ou envoyer des cadeaux d’un goût douteux. C’est d’ailleurs l’un de ses cadeaux qui va donner à Auden l’envie de changer d’air : un cadre de photo hideux avec un message cliché « le meilleur de la vie ». Sur une impulsion, Auden décide d’accepter l’invitation d’Heidi de passer l’été chez son père et elle.
Quand elle arrive dans la petite ville balnéaire, Auden fait la rencontre de sa demi-sœur nouveau-né Thisbé. Ce changement d’environnement et cette nouvelle personne dans sa vie vont la pousser à porter un nouveau regard sur ses parents, sur son enfance et sur ce qu’elle souhaite faire dans sa vie. Heureusement, elle va pouvoir compter sur l’aide d’un jeune homme de son âge, Eli, également insomniaque à la suite de la mort d’un de ses amis proches. Les deux jeunes adultes vont se lancer dans une quête pour profiter du « meilleur de la vie ».
Je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre en ouvrant ce livre. Le pitch me semblait intéressant mais très fleur bleue. Pourtant, En route pour l’avenir est loin d’être un roman niais. Au contraire, il aborde tout en subtilité la transition vers l’âge adulte mais aussi la parentalité, le deuil, l’amour, l’amitié ou les regrets. On assiste à l’évolution d’Auden, qui passe par différents états émotionnels à mesure qu’elle se construit en tant que personne autonome de ses parents, mais aussi à celle des personnages secondaires : Eli, le jeune homme hanté par la perte de son meilleur ami, Maggie, la vendeuse récemment larguée par son petit ami du lycée, Heidi, jeune mère isolée, Hollis le fils prodige et rebelle… Et les parents d’Auden eux-mêmes, en proie à leurs propres tourments.
Malgré toutes ces thématiques assez sombres, En route pour l’avenir pourrait être qualifié de roman feel-good car il y est avant tout question de la manière dont les personnages vont de l’avant et dépassent leurs problèmes. Le titre français est à cet égard assez bien choisi. Celui anglais, Along for the ride, met l’accent sur deux autres composantes du récit : le rôle du vélo dans l’intrigue – que je ne préciserai pas pour ne pas dévoiler d’éléments-clefs – mais aussi la proximité des personnages, le fait qu’aucun n’est aussi seul qu’il ne le pense initialement. Le roman est gorgé de moments d’entraide et de tendresse qui permettent de contrebalancer ses aspects les plus sombres.
Et c’est heureux ! Car, si j’ai dévoré cette histoire, certains passages concernant les problèmes d’Auden avec ses parents ont été compliqués à lire pour moi. Non pas parce qu’ils étaient dérangeants en tant que tels mais plutôt parce qu’ils se rapprochaient trop à mon goût de ma propre expérience en tant qu’enfant et adolescente et des propres interrogations ou prises de conscience que j’avais pu avoir en tant que jeune adulte. Évidemment, tous les lecteurs ne se retrouveront pas dans le personnage d’Auden. Cependant, certains éléments propres aux relations parents-enfants sont assez universels pour qu’un grand nombre de lecteurs se sentent concernés à un moment ou à un autre par ces sujets – si ce n’est du point de vue d’Auden, alors de celui de Maggie, d’Hollis ou d’Eli, ou même du côté des parents.
Pour conclure, En route pour l’avenir est un roman qui entremêle de nombreuses thématiques avec justesse et parvient tour à tour à être poignant et attendrissant.