Les Chroniques de l'Imaginaire

Soigner les maladies rhumatismales selon Hildegarde de Bingen - Strehlow, Wighard

Cet ouvrage se base sur les écrits d’Hildegarde de Bingen pour proposer des méthodes alternatives pour soigner les rhumatismes. Hildegarde de Bingen est une religieuse du XIIe siècle, connue pour ses écrits, compositions, illustrations mais aussi pour son observation de la nature, des plantes comme des animaux ou des minéraux qui lui ont inspiré des traitements naturels aux afflictions les plus courantes de son époque.

L’introduction de l’ouvrage rappelle la vision spirituelle de la nature et de la santé développée par Hildegarde : son concept des humeurs, qui resta longtemps populaire en médecine ou encore la part spirituelle de son travail. À ce titre, l’ouvrage fait bien de rappeler des éléments essentiels, à savoir que chacun doit être libre de prendre ou de laisser les conseils prodigués par Hildegarde de Bingen. Le fait de laisser de côté l’aspect spirituel est plus spécifiquement avancé mais un avertissement figure aussi concernant les traitements en eux-mêmes. Pour moi, c’est un pré-requis essentiel à ce genre d’ouvrages : il semble que la médecine dite « académique » ait confirmé certaines des intuitions d’Hildegarde mais que d’autres soient plus farfelues – même si l’existence d’effets placebo ne les invalide pas totalement.

Outre les propos introductifs et l’avant-propos, l'ouvrage se découpe en plusieurs rubriques. La première rubrique revient sur l’apparition des rhumatismes ou bien « L’autodestruction du corps ». Plusieurs rhumatismes y sont décrits. Leurs causes, telles qu’elles sont aujourd’hui connues de la science, sont d’abord décrites. Puis l’ouvrage propose des témoignages de personnes ayant souffert de ces afflictions et ayant connu une amélioration de leur état en suivant les conseils d’Hildegarde de Bingen soit en complément soit en substitution progressive de médicaments « traditionnels ». La nature des traitements proposés par Hildegarde pour chaque type de rhumatisme est également renseignée. J’ai apprécié que les traitements médicamenteux plus classiques ne soient pas décriés et que tous les patients ne cessent pas de les prendre. Cela me paraît être un principe de précaution bienvenu. Les témoignages attestent en outre d’un suivi médical assuré durant l’expérimentation de traitements alternatifs.

La seconde rubrique, plus courte, m’a moins convaincue et est un peu redondante avec la première. Elle est intitulée « Causes et modes de traitement de la goutte et des rhumatismes ». Elle revient sur les traitements proposés par la médecine classique, en pointant leurs écueils, avant d’aborder des traitements proposés par Hildegarde de Bingen. Il y est alors beaucoup question de spiritualité, sujet qui me parle fort peu. En revanche, j’ai été beaucoup plus sensible aux derniers arguments avancés, qui font du changement de mode de vie et du mode d’alimentation des facteurs d’amélioration de la santé physique. Ces arguments, bien plus pragmatiques, sont d’ailleurs plus conformes à ce que propose la médecine classique pour prévenir certaines pathologies.

« Les remèdes qu’Hildegarde puise dans la nature » est la rubrique qui sera la plus utile aux lecteurs souhaitant se soigner au plus près de la méthode proposée. Elle contient de nombreuses recettes, chacune assortie d’un « cas vécu », c’est-à-dire du témoignage d’une personne chez qui le traitement aurait fonctionné. Certaines recettes, comme le jus de plantain, semblent plus accessibles que d’autres, comme celle à base de paupières de baleine.

« La nourriture comme moyen de traitement » se concentre plutôt sur des types d’aliments : céréales, légumes, herbes et épices, etc. Ici, comme ailleurs, je pense qu’il y a à prendre et à laisser. Ainsi, la consommation fréquente d’épeautre (plutôt que de blé par exemple) ou de légumineuses est également mise en avant comme facteur d’une plus longue espérance de vie en bonne santé d’après des articles scientifiques récents. Cependant, la lecture de certains passages m’a cependant amusée tant ils semblaient datés, comme celui qui conseille à une personne malade qui aurait mangé des cerises de boire immédiatement un verre de vin pour ne pas ressentir les malaises que ce fruit pourrait lui causer.

La rubrique suivante prodigue des conseils, des exemples de traitement et donne des témoignages en lien avec les rechutes, qu’il s’agira donc d’éviter, et s’inscrit dans la lignée des rubriques précédentes.

Enfin, un lexique, une bibliographie, un index, une liste des principaux remèdes et traitements et d’adresses utiles viennent compléter cet ouvrage et facilitent grandement sa consultation.

Personnellement, je regrette l’abondance de témoignages anonymes, qui évidemment concluent à l’efficacité des traitements mais ont peiné à me convaincre. J’y aurais substitué des références à des travaux scientifiques récents confirmant la pertinence médicale de certaines idées, comme le changement d’alimentation. Il est frappant de constater que l’ouvrage ne contient aucune référence à ces travaux qui auraient pourtant pu lui conférer plus de crédibilité. D’ailleurs, dans cette chronique, les parallèles établis avec la médecine moderne sont uniquement de mon fait, à partir d’articles lus dans la presse généraliste. Sans cette connaissance « grand public », j’aurais pu être tentée d’écarter tous les conseils suggérés. Il est donc dommage que la preuve d’efficacité des traitements ne repose que sur ses témoignages et pas, occasionnellement, sur des preuves scientifiques lorsqu’elles existent.

En résumé, cet ouvrage contient une foule d’informations pour qui s’intéresse aux manières alternatives de traiter les rhumatismes, en complément d’un suivi médical classique. Certaines idées et recettes exposées semblent de bons sens, d’autres plus spirituelles et étranges mais c’est au lecteur de trancher.