Les Chroniques de l'Imaginaire

Cemetery Boys - Thomas, Aiden

Yadriel est un jeune homme transgenre que sa communauté refuse de voir comme un brujo avec des pouvoirs de brujos. Pire, pour eux, il n’aurait pas de pouvoir du tout, et serait donc une sorte de paria au sein de leur communauté. Pour leur prouver qu’ils ont tort, Yadriel, aidé de sa cousine Maritza, va effectuer seul le rituel qui lui permettra d’entrer en contact avec Notre Dame de la Mort, qui peut lui offrir les pouvoirs dont il rêve tant. Le rituel fonctionne, Yadriel est désormais un véritable brujo mais il ne sait pas encore comment l’annoncer à sa famille.

Alors qu’ils terminaient le rituel, les deux adolescents ressentent un énorme choc. Un des membres de leur communauté, Miguel leur cousin, vient de mourir, et tous l’ont ressenti au plus profond de leur être. Il faut à tout prix retrouver le « portaje » qui lie l’esprit du mort au monde réel afin de pouvoir comprendre ce qui s’est passé, et c’est ainsi que Yadriel et Maritza entament des recherches dans la partie du cimetière où ils se trouvent. Quand ils découvrent une chaîne en or ornée d’un pendentif, ils sont persuadés d’avoir trouvé le « portaje » de leur cousin, mais une surprise les attend quand Yadriel effectue le rituel pour découvrir quel esprit est lié à l’objet. Ce n’est pas le spectre de leur cousin qui se dresse devant eux, mais Julian, un parfait inconnu, mort dans de mystérieuses circonstances aussi.

Les trois adolescents décident alors d’enquêter sur la mort de Julian et de Miguel.

Le pitch de l’histoire semblait sympa. Des gens capables de parler aux morts, des guérisseurs occultes, une enquête, des amitiés, une histoire d’amour par-dessus, le cocktail était très intéressant. Sauf que le résultat, en français, est très en dessous de ce qui m’avait été vendu.

Commençons par les points positifs. Le lieu et la communauté choisis par l’auteur sont intéressants. Les latinos et leurs coutumes lors de la fête des morts étaient un bon choix et j’ai découverts quelques petites choses intéressantes. De plus, le lieu principal au cœur de l’histoire est un cimetière, qui a été plutôt bien décrit, et qui a éveillé ma curiosité.

Le personnage principal est trans. Aucun souci pour moi, on sent bien au l’auteur connaît son sujet, qui le touche personnellement, et à part son obsession pour les binders que porte Yadriel, les réflexions et les réactions de l’entourage du jeune homme ne m’ont pas paru excessifs, ni dans un sens, ni dans un autre. Et surtout cela donne une visibilité intéressante aux personnes trans et aux difficultés qu'iels peuvent rencontrer après leur coming out.

Dans les points moyens, Julian est un énorme stéréotype de bad boy mauvais élève qui sèche les cours et fait du skate. Colérique et impulsif, il est évidemment membre d’une petite bande qui fait un peu les quatre cents coups. Rien de bien original, à part le fait qu’il soit un esprit.

Maritza n’est qu’un faire valoir de Yadriel. Toujours là pour aider son cousin, elle n’existe tout au long de l’histoire que pour une seule chose : sauver son cousin à la fin de l’histoire. Mais cela ne fait pas d’elle une héroïne, car son geste sera à peine commenté. L’auteur aurait dû prendre le temps de la développer un peu plus et surtout de la mettre plus en avant.
Quant à l’histoire, l’enquête est clairement au second plan, et sa résolution involontaire très rapide.

Passons maintenant aux choses qui fâchent, et qui m’ont vraiment fâchée très fort. La traduction est une catastrophe d’un bout à l’autre du livre. Et ça commence dès les deux premiers mots qui ouvrent l’histoire : « Strictement parlant ». Un adverbe suivi d’un participe présent, ça donne déjà un début de phrase très lourd. Mais ce n’était que le début, et je me suis dit que ça allait s’arranger par la suite.

Comment dire que j’ai été très déçue ? Au fur et à mesure de ma lecture, je me suis rendu compte qu’il n’y avait aucune cohérence dans la traduction. « La dame de la Mort » devient « Notre Dame des Morts », les rangers de Yadriel deviennent des « bottes de combats », puis ne sont carrément pas traduites donnant un magnifique « combat boot » au milieu d’une phrase. Et c’est sans compter les mots qui manquent, les phrases incohérentes, les répétitions, les verbes mal employés, et surtout la très désagréable impression générale que l’ensemble a été traduit avec Google Translate. Mais une vieille version, hein. Parce j’ai fini par faire le test. Par dépit et frustration, j’ai récupéré la version originale du texte, pris le premier paragraphe du livre, collé dans Google Translate, et le résultat était bien meilleur et bien plus lisible que la traduction effectuée par un humain. Dommage que ma vitesse de lecture en anglais soit bien moins rapide qu’en français, sinon j’aurais lu l’ensemble en version originale.

Donc, que s’est il passé pour que le résultat en français soit d’une qualité largement inférieure et tellement appauvrie par rapport à la version originale ? Un souci avec le traducteur ? Un souci avec le ou la chargé d’édition qui n’a pas relu le texte —parce que c’est clairement l’impression que ça donne, pas de relecture, pas de réécriture ou de remaniement pour ça soit plus fluide et plus lisible, sachant qu’aucun mot en espagnol n’a été traduit ou ne propose de traduction en pied de page…—, ce qui est loin d’être professionnel ? Ou alors j’ai reçu par erreur une épreuve non corrigée au lieu d’un service presse ? C’est dommage. Vraiment dommage, parce que l’histoire, même si ce n’est pas un chef d’œuvre, méritait plus de considération que cela. Et ce n’est pas en traduisant les critiques dithyrambiques américaines sur le site d’ActuSF que cela peut arranger les choses.

A noter aussi que l’epub que j’ai reçu pèse très lourd (plus de 2Mo pour ce genre de fichier, c’est énorme) et que, contrairement à l’usage pour les fichiers numériques, la table des matières se trouve à la fin, ce qui ne permet pas de sélectionner un chapitre en particulier sans aller au bout du livre. De plus, on ne peut pas savoir l'avancée de la lecture au sein d'un chapitre, seulement l'avancée globale dans le livre.