Les Chroniques de l'Imaginaire

Myala : seconde chance - Peschet, Lilian

Dans un futur proche, certains repris de justice se voient offrir un choix. S'ils rejoignent les forces de police pendant un certain temps, ils pourront bénéficier d'une remise de peine. Cryogénisée après un attentat à la bombe, Myala accepte cette proposition. La voici lieutenant, à la tête d'une brigade chargée des enquêtes qui n' intéressent pas la prestigieuse police fédérale européenne. Elle n'a plus ni famille ni ami, plus que ses collègues. Alors, quand l'un d'eux se fait abattre sous ses ordres, l'humeur n'est pas au beau fixe. Surtout qu'on lui impose un bleu un peu trop propre sur lui pour le remplacer et qu'une affaire bien sordide de tueur en série arrive sur son bureau.

Ce roman de Lilian Peschet est à mi-chemin entre le polar et la dystopie. Il prédit un futur où la libéralisation de la société s'est poursuivie à marche forcée avec l'aide des nouvelles technologies, accentuant les inégalités à un niveau démesuré entre les élites fortunées et le reste de la population. Les banlieues de Paris sont devenues des ghettos où les drogues virtuelles le disputent aux produits naturels et de synthèse. C'est un peu surprenant que ce pourrissement de la société n'ait pas touché la police : Myala et ses collègues manquent d'argent et de soutien, certes, mais ils sont tous à peu près droits dans leur bottes et bien décidés à faire leur job du mieux qu'ils peuvent. Étonnante conscience professionnelle pour d'anciens taulards, même monitorés par une IA omnisciente !

Le récit alterne les points de vue de Myala et d'un autre personnage qui s'avère lié à son enquête malgré lui. Ses chapitres ont de quoi faire grincer des dents, car c'est un homme dont l'intelligence a été génétiquement altérée pour le limiter au niveau d'un enfant prépubère, mais dont le travail implique de satisfaire sexuellement des femmes malades. La lecture de ces passages ne m'a pas franchement enthousiasmé et je peux imaginer qu'ils auront de quoi faire lâcher le livre à plus d'un.

Myala est plus agréable à suivre. C'est un flic malgré elle comme on en a déjà vu des milliers dans d'autres œuvres de fiction et ses dilemmes intérieurs n'ont rien de transcendant, mais elle est suffisamment attachante pour qu'on aie envie de la voir s'en sortir. Ses équipiers sont en revanche un peu trop plats pour susciter la même empathie, y compris le bleu alors même qu'il semblait promis à un rôle plus important dans l'intrigue.

Le récit est plutôt bien mené, même si les passages décrivant le monde de Myala ne sont pas forcément intégrés de la manière la plus harmonieuse qui soit au flot du texte (utiliser le bleu comme avatar du lectorat aurait peut-être permis de présenter de manière plus naturelle ces informations ?). Certaines péripéties semblent par ailleurs n'être là que pour gonfler le nombre de pages, comme tout ce qui tourne autour des nouvelles jambes bioniques de l'héroïne, trouvées, installées, endommagées et remisées en l'espace d'une poignée de chapitres. La fin est quant à elle très ouverte et laisse beaucoup de possibilités pour une suite, peut-être un peu trop.

Dans l'ensemble, Myala : seconde chance est un polar dystopique plutôt bien fichu. Même s'il souffre d'un certain manque d'originalité et de profondeur, il se laisse lire sans déplaisir.