Les Chroniques de l'Imaginaire

La cité de laiton (Daevabad - 1) - Chakraborty, S.A.

Le Caire, XVIIIe siècle. Nahri est orpheline, mais a toujours trouvé moyen de se débrouiller. Elle arnaque les crédules en leur faisant croire en ses dons de guérison, visite des maisons vides en dérobant de menus objets. Elle ne croit pas en la magie, mais fait comme si pour gagner quelques sous.

Un soir, Nahri organise à la demande de clients un zar, un rituel pour exorciser une jeune fille possédée. Elle chantonne un peu n'importe quoi, transposant sans y penser les chansons traditionnelles de ces cérémonies dans sa langue maternelle qu'elle est seule à parler. Quelques heures après, elle découvre à ses dépens que le monde surnaturel existe bel et bien : prise en chasse par des goules, elle est sauvée par un guerrier djinn qu'elle a invoqué sans le vouloir...

Dara, ledit djinn - même s'il préfère le nom de Daeva à celui de djinn -, est furieux contre l'arnaqueuse qui l'a fait venir par erreur. Pourtant, il reconnait en elle une Shafit, une métisse de djinn et d'humain, et mieux encore : Nahri serait la dernière survivante d'un clan de puissants guérisseurs. Son devoir est clair : la mettre en sécurité. Dara entraîne Nahri contre son gré dans un périple dangereux (elle a visiblement des ennemis qu'elle ne se connaissait pas...) pour rejoindre Daevabad, la mystérieuse cité de laiton où demeurent les êtres du feu, demeure ancestrale de sa famille.

Avec La cité de laiton, premier tome d'une trilogie, S.A. Chakraborty nous plonge dans un univers oriental passionnant. L'autrice sait rendre le décor crédible et c'est un vrai régal de s'y immerger, qu'il s'agisse des rues du Caire, du désert brûlant ou de la lointaine Daevabad cachée en Perse. Un glossaire en fin d'ouvrage permet d'expliciter les termes égyptiens/islamiques/arabiques/etc. (et aussi spécifiques au roman) mais ceux-ci sont en fait parfaitement intégrés dans le récit, qui se lit aisément.
La magie qui apparait dans l'ouvrage est également une magie orientale, où les djinns chevauchent des tapis volants et peuvent être esclave d'anneaux ou de lampes magiques...

On suit en alternance deux personnages principaux. Nahri et Dara ? Perdu ! Nahri et Ali, un prince de Daevabad. Tant pis pour moi, qui aurais aimé découvrir également le point de vue de Dara. Nahri est décidée et débrouillarde, elle n'hésite pas à prendre les choses en main quand elle l'estime nécessaire. Malheureusement, Dara aime rester mystérieux et elle a bien du mal à comprendre dans quel nid de serpents elle a mis les pieds, totalement ignorante qu'elle est de la situation. Ali de son côté est un jeune prince idéaliste et naïf, qui a tendance à se fourrer dans les ennuis. Les événements vont se charger de lui ouvrir les yeux. Malgré leur hostilité initiale et le fait qu'ils appartiennent à des camps adverses, tous deux vont se découvrir bien des points communs. Au grand dam de Dara, jaloux de l'amitié naissante entre sa protégée et son ennemi ancestral... Vous devinez que de tendres sentiments vont s'en mêler, attendus mais pas dégoulinants de guimauve pour autant.

Le rythme est dynamique, et si au début les péripéties de Nahri semblent bien tranquilles, le danger se révèle bien vite omniprésent et les rebondissements fréquents. Le mystère est également là, et on a souvent envie de secouer les personnages pour en apprendre davantage sur les secrets du passé. L'intrigue géopolitique de fond est complexe, laissant beaucoup de place pour que les personnages aient des motivations pas toujours évidentes de prime abord, mais quand même assez compréhensible pour ne pas (trop) perdre le lecteur. Comme il s'agit du premier tome d'une trilogie, le roman finit un peu en queue de poisson, avec pas mal de problèmes encore irrésolus. 

C'est une excellente lecture, et j'ai très envie de lire la suite !